Après ce coup d’éclat, les frères Perret récidivent, ils vont affirmer leur intérêt pour le béton, et s’y lance à corps perdu. Leur père décédé en 1905, il n’ont plus d’obstacle pour affirmer leur amour pour le béton. Ils vont devenir les spécialistes de ce grand matériau et de cette façon de construire en France. Ils construisent beaucoup.
L’entre deux Guerres.
C’est pendant cette période que le style de A.Perret trouve son aboutissement et son apogée. Le béton armé commence à trouver ses lettres de noblesse et à être reconnu comme fiable. La première guerre mondiale en est un peu pour quelque chose. Il a fallu construire des usines d’armement rapidement et qu’elles soient solides. On a donc utilisé le béton armé, il est donc rentré dans les habitudes constructives française. On commence à l’intégrer dans la vie quotidienne.
L'Eglise Notre Dame de la Consolation, Le Raincy.
Bâtie à la mémoire des morts de la bataille de l'Ourcq. C'est l'une des premières de la seconde guerre mondiale. Elle est construite entre avril 1922 et juin 1923. le chantier est rapide par la simplicité du bâtiment et de son plan. C'est la première église entièrement en béton armé en France. Le choix est volontaire et affirmé. Le matériau n'est pas embelli. Il est livré tel quel. Beaucoup d'innovations architecturales apparaissent dans le contexte des églises. Ici, c'est une solution inédite.
Plan basilical, sans transept. Plan rectangulaire. 1000 m2.
Grande austérité à l'extérieur. Couleur grise du béton. La tour-flèche marque la façade d'entrée. C'est un vrai signal dans la ville. Elle affirme le rôle religieux de l'édifice. Si on l'enlève, l'église ressemble à un hangar industriel. La tour-flèche est très autonome. Elle se détache assez nettement du reste du bâtiment. Elle rappelle à la fois le minaret arabe et la flèche gothique. Elle est moins travaillée que le reste du bâtiment.
Grand intérêt pour la colonne. Elle structure l'espace intérieur. Elles n'ont ni base ni chapiteau. Elles sont organisées en quatre rangées de sept colonnes chacune. Les colonnes définissent l'espace et portent le bâtiment en entier. Elles donnent une impression d'extension de l'espace par leur nombre. Le choeur est placé sur une estrade. Le maitre-autel s'y trouve. Cela crée un espace dessous pour la sacristie.
Le plafond est voûté. Il est formé de voiles minces de béton de 3 ou 4cm d'épaisseur en anse de panier. Perret a déjà testé cela dans le dock Wallut en 1915 à Casablanca. Il faut souligner l'importance de leur expérience en Afrique du Nord. Perret et frères ont collaboré avec Albert Ballu au Maroc. Il était intéressé par les compétences des frères Perret sur le béton. Au Maroc, on se permettait plus d'essais architecturaux qu'en France.
Cette question du couvrement traduit une préoccupation du moment ; réussir à couvrir le plus d'espace possible. On l'a vu pour le métal au 19e avec la galerie des machines à Paris. On retrouve une volonté semblable dans le béton.
La partie inférieure du mur de l'église est faite de panneaux pleins en béton. Au-dessus à 2m10, le mur prend la forme de claustras ; grands panneaux ajourés par des motifs géométriques. Du vitrail peut y être inséré dans ces motifs. Ils sont conçus par Marguerite Huré. Elle introduit de l'abstraction dans le domaine du vitrail religieux. Quelques scènes figurées. Les motifs sont issus de cartons conçus par Maurice Denis. Les panneaux sont très colorés. Ils laissent passer la lumière naturelle. Cela crée tout un tas de jeu de couleurs. Une ambiance intérieure extrêmement lumineuse. Toutes les façades du bâtiments sont traitées ainsi. Cela tranche totalement avec l'austérité extérieur. Cela rappelle la luminosité architecturale gothique. La confrontation du vitrail et de la structure de béton est très subtile. Très grand raffinement dans l'architecture du béton.
La chapelle est surnommée chapelle du béton armé.
Elle est construite avec un budget serré donc la qualité du béton n'est pas exceptionnelle. Du coup, dans les années 60, la chapelle subit de lourdes restaurations. Certains panneaux des claustras ont été changés.
La ville est faite de toute une série de bâtiments industriels. Ce sont beaucoup de hangars en béton armé construits rapidement pendant la première guerre mondiale. L'église crée un lien avec. C'est réellement une église de quartier pour les ouvriers.
Auguste Perret était très fière de cette structure. Elle lui a permis de prouver les qualités du béton. La chapelle a beaucoup influencée le chantier d'autres églises. Perret construit un vrai discours architectural et une prise en compte de la symbolique. C'est un moment clé dans la carrière de Perret.
Le style de Perret va culminer avec le palais d'Iena, à Paris. Il est conçu en 1936 pour accueillir le musée des travaux publics. C'est une commande d'Etat par le ministère des travaux publics. Cela sous-entend des moyens financiers importants et une grande symbolique. Le chantier a lieu dans le contexte de la préparation de l'exposition internationale dans les arts et des techniques de la vie moderne à Paris en 1937. Le musée abritait de grandes maquettes du génie civil. Elles sont très volumineuses donc les salles doivent être imposantes.
Perret ne va pas terminer le bâtiment. Il construit l'aile sud et la rotonde. Il meurt en 1954. Son élève Paul Vimond construit entre 1960 et 62 l'aile nord. Gilles Bouchez achève le bâtiment dans les années 90.
Le bâtiment est monumentale alors qu'il n'est pas très grand. C'est vraiment une impression de monumentalité.
La parcelle est triangulaire. Le bâtiment s'y adapte en étant en forme d'isocèle. Le sommet est fermé par une rotonde. Tout le bâtiment est en béton armé.

Perret développe le principe de la double ossature. Pour les ailes, il construit une ossature extérieure ; la primaire. Elle est composée de colonnes libres de 12m de haut posées sur une poutre épaisse, elle même sur une série de supports complexes. La colonnade est flanquée de claustras. Les colonnes s'effilent vers le bas. C'est l'antithèse de la colonne de pierre antique. Mais cela rappelle la colonne médiévale musulmane comme dans la mosquée de Kairouan.
Une ossature secondaire délimite les éléments intérieurs et porte les planchers. Elle se glisse dans la primaire. Cette double ossature est valable pour tout le bâtiment.
La rotonde ; reprend le même principe. Une première colonnade monumentale soutient l'entablement et la couverture du bâtiment. L'ossature interne est faite de deux piliers qui encadrent la colonne primaire. Cela la met en valeur. Les piliers soutiennent un entablement intérieur formé de claustras dans des dessins triangulaires. Cela délimite des travées. Elles sont marquées par des baies vitrées rectangulaires. On retrouve l'intérêt de Perret pour la lumière naturelle. Les maquettes ne craignent pas la lumière naturelle. La rotonde est à l'entrée du bâtiment.
1989 : mosaïque par l'artiste Martial Raysse.
Salle en hémicycle qui servait de salle de conférence. Il y en a un couloir autour. La salle est aveugle. Elle est couverte de deux coupoles superposées. La coupole supérieure forme le dôme que l'on voit de l'extérieur. Elle est toute en béton armé en résille avec des panneaux de verre pour laisser passer la lumière.
Pourquoi une double coupole ? Cela permet de contrôler l'arrivée de la lumière qui est plus tamisée. De plus, cela donne plus d'acoustique. Confrontation lumière et béton = fluidité et dureté. Chez Perret, la lumière est un vrai matériau.
Les colonnes sont omniprésentes dans ce bâtiment. Les salles intérieures sont structurées de files de colonnes sans bases. On les appelle salles hypostyles. Les colonnes extérieures ont un chapiteau mais pas celles à l'intérieur. Elles sont cannelées et très élancées. Elles s'effilent vers le bas. Perret s'inspire de l'architecture grecque archaïque dont le Parthénon à Athènes. Il réinterprète de manière moderne le vocabulaire antique. Il inverse car il veut révéler les qualités du matériau qu'il utilise. Dans l'Antiquité, la colonne est évasée vers le bas pour supporter le poids des tambours en pierre. C'est une raison technique. Perret est rationaliste donc le matériau définit la forme architecturale. Perret travaille avec le procédé Hennebique. Il l'utilise pour relier les colonnes, les poutres et les entablements. Les colonnes ne sont plus un empilement. Le tout est lié et encastré. Le béton est sculpté d'un décor de feuilles au niveau du chapiteau. Il crée un nouvel ordre architectural. Perret utilise vraiment les qualités du matériau et le révèle. Il a eu l'idée de la forme de la colonne en voyant un palmier en Egypte qui poussait plus épais à son sommet. Les colonnes sont faites par des coffrages en bois donc elles ne sont pas parfaitement rondes. Elles sont polygonales mais cela ne se voit pas à l'oeil nu. L'escalier est en béton armé. Les marches sont en pierres calcaires et la rampe en fer forgé. C'est un escalier tournant, suspendu. Deux volées. Il semble tenir tout seul. Forme de coeur ou de fer à cheval au choix... Très majestueux et très léger. Il est mis en valeur car il se détache devant une paroi de claustras. La lumière chatoie ses formes.
LE CORBUSIER
Charles-Edouard Jeanneret
Le Corbusier s'était fait un costume ; noeud papillon, lunettes rondes. Il attire les médias. Il prend son pseudonyme en 1920. Capacité médiatique et polémique.
Perret et Le Corbusier étaient amis. Ils se fâchent en 1923 à cause d'un désaccord architectural sur la fenêtre. Perret a toujours conservé la fenêtre verticale traditionnelle tandis que Le Corbusier prône la fenêtre horizontale. Tandis que Perret se place dans la lignée du classicisme structurel, Le Corbusier fait parti des modernes radicaux. Il utilise le béton armé. Il prône un renouvellement radical des formes sans aucun héritage. Il fait parti de l'avant-garde. Activité plastique progressiste. Le Bauhaus et De Stijl sont des mouvements d'avant-garde. Constructivisme en URSS.
A l'occasion de l'exposition internationale des arts décoratifs et industriels en 1925, Le Corbusier présente le pavillon de l'esprit nouveau en béton et en métal. C'est très épuré. Des volumes géométriques. Cela a fait grand bruit. Début de la maison comme une machine à habiter.
Les architectes progressistes se regroupent avec des plasticiens et des designers au sein de l'union des architectes modernes (UAM) en 1929. Le CIAM ; congrès international d'architecture moderne est créé en 1929 et dure jusqu'en 1959. C'est un lieu de débats architecturaux de l'avant-garde du monde entier.
Robert Mallet-Stevens
Charlotte Perriand
Pierre Chareau
G Guévrékian
H Laurens
T.V Doesburg
Le Corbusier nait en Suisse. Son père travaillait dans l'industrie de l'horloge. Il intègre une école d'art. Il est marqué par son prof Charles l'Eplattenier. Ils resteront en correspondance toute leur vie.
Le Corbusier est un grand voyageur. Au Brésil, il a marqué toute une génération d'architectes dont Lucia Costa et Oscar Niemeyer, architectes modernistes. Il fonde la revue l'esprit nouveau. C'est un théoricien. Il a écrit 34 ouvrages, une centaine d'articles. Il fait environ 305 projets. Tous n'ont pas aboutis. 78 édifices dans 12 pays. Il travaille souvent avec son cousin Pierre Jeanneret.
Le Corbusier a inventé le système dom'Ino ; domus et innovation, en 1914. Le système en béton est basé sur l'articulation de poteaux et de dalles. Cela forme l'ossature de n'importe quel bâtiment. Les murs sont ajoutés comme des parois de remplissage. Cela permet de construire vite.
Les cinq points d'une architecture nouvelle sont illustrés dans la villa Savoye (villa Les heures claires), 1929-31. Il utilise les pilotis comme ossature porteuse du bâtiment. Il place dessous le garage. L'automobile est une icône de la société machiniste.
Oublie la logique de fondation du bâtiment
façade libre. Les parois sont des écrans légers enduits de blancs, couverts de fenêtres en bandeau (horizontales).
Éléments végétaux sont importants chez le Corbusier. Nature très domestiquée
toits-terrasse
Le Corbusier s'inspire de Garnier pour ses cubes en béton avec un toit terrasse et de sa proposition d'immeuble sur piloris pour la fondation Rotschild.
La question de la circulation est très importante chez le Corbusier. Ossature importante comme chez Perret.
C'est difficile pour un architecte de faire totalement table rase du passé. Le Corbusier a tout de même des références inavouées.
Après la seconde guerre mondiale, on passe à une utilisation massive du béton armé en architecture. Nécessité de construire vite et beaucoup. Il faut donc industrialiser la construction. C'est le matériau fétiche de la période des Trente glorieuses. Forte hausse économique. Volonté de progrès. Il faut moderniser. La seconde guerre mondiale a fait des destructions très lourdes sur l'ensemble du territoire. Les villes sont très touchées ; portuaires, industrielles et stratégiques. 460 000 immeubles détruits. 2 millions sont très endommagés. 60 000 usines. Beaucoup d'infrastructures n'existent plus. La reconstruction dure pendant 10 ans. Le chantier colossal est dirigé par le ministère de la reconstruction et de l'urbanisme (MRU) créé en novembre 44. Le rôle de l'Etat s'affirme et s'impose. Tout le chantier est contrôlé.
Question du confort des logements, du réseau des circulations et de gestion de la densité sur les territoires urbains.
On part sur une reconstruction à l'identique. Ex : St Malo. Cependant, ils sont reproduits d'une façon plus moderne. Ex ; les rues sont élargies. Des détails modernes qui ne se voient pas forcément. Beaucoup de débats autour de la reconstruction. Les chantiers sont de véritables laboratoires. Problèmes de matériels et de main d'oeuvre (tous les hommes ne sont pas revenus de la guerre). Les matériaux sont difficiles à acheminer car les usines sont détruites et les voies de communications aussi. Or, il faut aller vite car les gens n'ont plus de logements. Des conditions difficiles de reconstruction. Perret et Corbusier font partis des architectes de la reconstruction.
Perret reconstruit la ville du Havre.
Elle a été détruite car son port est stratégique. Le centre ville est rasé. Perret travaille avec une équipe de 24 architectes. Perret propose de reconstruire le centre ville sur le modèle de l'urbanisme sur dalle ; une grande plaque de béton sur le modèle de l'urbanisme sur dalle sous laquelle on place les parkings et les câbles. Au dessus on construit les immeubles. C'est le principe de la dalle Kennedy à Villejean. Cela n'a pas été accepté par la population. C'était trop radical. De plus, cela aurait coûté trop cher. Il conçoit alors une grande ordonnance urbaine sur le sol naturel de la ville. Il reprend les tracés et les places anciennes. La ville s'organise autour d'un triangle :
port
hôtel de ville porte Océane.
Un grand boulevard relie chaque élément à l'autre et ouvre sur la mer. Modernisation. 80M de large. Le reste de la ville est organisé en îlots. L'organisation est rationnelle. L'ensoleillement des nouveaux logements est respecté. De même, le problème des vents marins est pris en compte.
Le Havre est un laboratoire de l'architecture du béton. Les architectes se sont fait plaisir à innover et le budget suivait. Cela lui permet d'être inscrite au patrimoine de l'unesco. La ville présente une unité de style. Toute en béton mais avec des décors.
Les bâtiments publics sont conçus par Perret lui-même. Exemples :
l'hôtel de ville. 150M de long. Horizontal, rythmé par une colonnade et une tour de 17 étages comme un belvédère.
Église st Joseph, contrecarre la dynamique horizontale de la ville. Métaphore du phare. Plan central carré. Tour lanterne. Béton armé. Claustras de pavés de verre coloré sur toute la partie supérieure.
Appartements sont confortables : salles de bain avec baignoire, cuisine moderne et équipée. Il y a une réflexion sur la place de la femme. La cuisine est ouverte pour que la femme participe aux conversations tout en cuisinant. Cependant, la location est assez chère.
En 1947, un appartement témoin est présenté à Paris.
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