1. La marque principale
Cette première stratégie est la plus commune. Beaucoup de brasseurs ne soutiennent en effet qu’une gamme limitée de marques et la vendent à travers le monde entier. Grâce à la concentration des actifs technologiques et du marketing uniquement focalisé sur cette gamme limitée, les marque se vendent assez bien et apportent souvent à l’entreprise une domination (ou presque) du marché. Pour son expansion internationale, ce genre d’entreprise incite la production de sa propre marque à l’étranger. Elle négocie avec des brasseurs locaux afin de construire et gérer les sites de production de sa marque.
L’exemple le plus connu est Heineken qui ne produit en fait que quatre marques : Heineken, Amstel, Murphy’s et Tiger beer (cette dernière concerne uniquement l’Asie). Heineken s’est concentré sur sa marque principale (Heineken) et l’a élevée au niveau mondial. Il en va de même pour Annheuser-Busch avec Budweiser.
2. La sous-traitance
Certaines brasseries (en fait très peu !) ne s’occupent que de la recette et du marketing du produit pour en confier la production à un sous-traitant. Ce dernier est souvent un indépendant trop faible pour entreprendre la commercialisation complète d’une marque.
On peut citer comme exemple la Boston Beer Company. BBC s’occupe de développer la recette et le marketing de son produit dont il confie la production à Stroh’s Brewery (= "contract brewery" ). Le packaging et la distribution sont également confiées à des entreprises spécialisées.
3. Le portefeuille de marques
Ce genre d'entreprise se spécialise dans différents segments du marché (Lagers, Premiums, Specials, …) avec différentes marques. Son expansion se fait par l’acquisition de divers brasseurs nationaux dont elle renforce les marques déjà établies. La diversification du portefeuille de marques d’un tel type d’entreprise lui permet d'être actif sur les différents segments et de restreindre ainsi son risque opérationnel.
C’est ici qu’entre en jeu Interbrew. Son plus grand atout est en effet constitué par la multitude de marques qu'elle gère. Nous verrons que ce portefueille de marques permet à Interbrew d'établir un réseau de contacts mondial entre une multitude de spécialistes et experts de tous genres de brasserie. Ce réseau à pour but de disperser l'expertise et le know-how de tous ses spécialistes à travers l'entreprise. Son domaine le plus riche en capacités distinctives est donc l’architecture, ses nombreuses acquisitions effectuées à travers le monde. Ce domaine est suivi de près par la réputation, les diverses marques devant être soutenues activement.
Chapitre 3 : ARCHITECTURE ___________________________________________________________________________
1. Architecture interne
La structure interne d’Interbrew est organisée comme suit : le Conseil d'Administration, assisté par trois comités, préside l’ensemble de l’entreprise mais la gestion de l’entreprise se situe au niveau de la direction, ou "Executive Management Committee". Sous le « chief executive », Monsieur Hugo Powell, on retrouve une structure orientée sur base de territoires géographiques. Il s’agit d’une structure formelle de type « Market M-form », comme le montre le schéma ci-dessous :

Cette structure reflète la stratégie de segmentation adoptée par Interbrew et permet au groupe de définir des objectifs clairs en matière de croissance. On notera que dans chaque division opérationnelle, on retrouve également une segmentation par pays. Cependant, ce n’est pas la structure qui constitue un avantage compétitif puisqu’il est évident qu’elle peut être facilement recopiée par d’autres. Il faut plutôt chercher du côté des relations entre les travailleurs… Interbrew a réussi à former un réseau de relations entre les managers et autres employés de toutes les brasseries du groupe. La société a su réunir une foule de spécialistes en une équipe mondiale et la direction stimule l’évolution de ce réseau en permettant aux spécialistes de se rencontrer par l’organisation de multiples visites et échanges. Cette pratique a pour but principal de diffuser les "best practices" et les connaissances personnelles des employés a travers les différentes entités du groupe. C’est ce qu’exprime cet extrait du rapport annuel de 1998 :
The cross fertilization of best practices in every field is driving costs down …If we find a way to cut our energy costs in Alberta, everyone in Canada, Belgium and the rest of Europe hears about it. Un tel réseau de relations personnelles entres les employés d'une entreprise ne peut être copié. Il est propre à l'entreprise. De cette façon, le groupe a pu continuellement réduire ses coûts et accroître ses profits. Bref, le maître mot chez Interbrew est de créer une excellence opérationnelle.
La stratégie d'expansion d'Interbrew correspond à ce « state of mind ». En effet, la société acquiert toujours des brasseries locales bien établies ; elle profite ainsi de la connaissance du marché local des autochtones Ceux-ci répondent mieux aux besoins des consommateurs qu’ils connaissent depuis longtemps. Interbrew considère en effet qu’on n’augmente pas l'expertise d'une entreprise en remplaçant les managers locaux par des managers "importés" de l'entreprise-mère. C'est par le respect de l'expérience de ses nouveaux employés que l'on peut obtenir une fertilisation croisée des "best practices" comme décrit ci-dessus. Cet échange de connaissances serait beaucoup plus difficile à atteindre si Interbrew exportait ses propres marques. On peut donc affirmer que les nombreuses possessions d’Interbrew et leur diversification géographique jouent un rôle important dans l'acquisition d'expertise et la création de valeur du groupe. Ces dernières années les acquisitions et participations d'Interbrew ont connu un élan formidable. En 1990 Interbrew n’était actif que dans 4 pays. Actuellement, il est actif dans plus de 20 pays :
Sites de production
| Nom des sociétés appartenant totalement ou en partie à Interbrew dans ces pays
| Position marché
| Contrats licence
| Participations minoritaires
| Joint Ventures
| Belgique
| Interbrew Belgium
| N°1
| Australie
| Mexique (N°2)
| Corée (N°2)
| Bulgarie
| Astika (82%) Burgasko (74%) Kamenitza (70%) Plevensko Pivo (62,6%)
| N°1
| Italie
| Luxembourg
| République dominicaine (N°2)
| Canada
| Labatt breweries of Canada (wholly owner)
| N°1
| Suède
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| Chine
| Jinling Brewery Co (60%) Nanjing (80%)
| Leader in Nanjing
| UK (N°1 en bières spéc.)
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| Croatie
| Zagrebacka Pivovara (66%)
| N°1
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| France
| Brasseries Stella Artois
| N°3
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| Hongrie
| Borsodi Sörgyar (97%)
| N°2
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| Montenegro
| Industrija Piva I Sokova Trebesja (64,8%)
| N°1
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| Pays-Bas
| Interbrew Nederland
| N°2
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| Roumanie
| Bianca Interbrew (51%), Bergenbier, Poberco (51%), NDC (56%)
| N°3
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| Russie
| Sun Interbrew (34%), Rosar (73%), Klin (75%)
| N°2
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| Ukraine
| Chernigiv Brewery Desna (51%)
| N°5
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| Etats-Unis
| Labatt USA/ Latrobe brewering company (70%)
| N°1 en bières spéciales
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| Puisque la politique d'Interbrew est de renforcer des marques déjà existantes, le groupe préfère acquérir un joueur important avec une réputation déjà établie sur le marché local. Souvent il s'agit d'un brasseur du top 3 du marché local. En outre, une des conditions absolues pour effectuer une acquisition est la perspective de croissance du marché local. C'est dans ce cadre qu'il faut replacer les acquisitions dans les pays de l'Europe de l'est et en Asie. En effet, la Russie, la Roumanie, la Hongrie, la Chine et la Corée sont en général des pays avec un potentiel de croissance très élevé dans le secteur brassicole. De cette manière Interbrew assure des profits futurs.
En guise de conclusion pour cette partie, nous pouvons donc dégager les éléments qui différencient Interbrew de ses concurrents dans son secteur :
1) L'établissement d'un réseau interne et informel de contacts multiples entres les employés afin d’assurer la diffusion de l'expertise (dans tous les domaines) du personnel de l'entreprise. Cette mentalité a doté Interbrew d'un outil opérationnel unique et d'une équipe de haut niveau.
2) L'expansion de l'entreprise à travers le monde par acquisitions de brasseries locales. Cette conquête de l’étranger a permis à Interbrew de se forger un nom sur la scène internationale et de s’assurer des profits futurs en attaquant des marchés de croissance. Elle a également apporté une masse d'expérience comme celle des marchés locaux. Ceci constitue un avantage important sur des brasseurs qui préfèrent exporter leurs propres produits. Il faudra à ces derniers davantage de temps pour asseoir leur connaissance du marché et décider du positionnement de leurs produits. Interbrew a choisi un moyen plus rapide et plus sûr de garantir son avenir.
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