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la dernière de mes lectures d’actualité …dans le Psychoanalytic Quaterly, un article comme celui de M. Edward GLOVER intitulé Freudian or neo–freudian, entièrement dirigé contre les constructions de M. ALEXANDER,
du fait qu’au nom de critères désuets une construction comme celle de M. ALEXANDER… mon Dieu, je n’ai pas hésité à l’attaquer de la façon la plus formelle, il y a déjà quatorze ans, au Congrès de Psychiatrie de 1950 …mais enfin, qui est la construction d’un homme de grand talent,
…je me rends cette justice qu’à travers tous les avatars que rencontre mon discours ici même et ailleurs, assurément on peut dire que ce discours obvie, fait obstacle, à ce que l’expérience de l’analyse ne vous soit pas transmise d’une façon absolument crétinisante. Je reprends à partir de là mon discours sur la pulsion. J’ai été amené à l’aborder au moment… après avoir posé que le transfert dans l’expérience est ce qui manifeste la mise en action de la réalité de l’inconscient en tant qu’elle est sexualité. Je me trouve arrêté, pour poursuivre sur ce que comporte cette affirmation même : si nous sommes sûrs que la sexualité est là présente en action dans le transfert, c’est pour autant qu’elle se manifeste à certains moments à découvert sous la forme de l’amour. Or, c’est là ce dont il s’agit : est–ce que l’amour représente le point sommet, le moment achevé, le facteur indiscutable qui nous présentifie la sexualité dans l’hic et nunc du transfert ? À ceci obvie, s’oppose, objecte, de la façon la plus claire, le texte non certes isolé, mais choisi par moi comme central… et sans qu’on puisse aucunement accuser ce choix d’arbitraire …puisque le texte dont il s’agit est le texte de FREUD, qui a proprement pour objet Les pulsions et leurs vicissitudes. C’est ce texte que j’ai commencé d’aborder la dernière fois en essayant de faire sentir sous quelle forme problématique… autrement dit fourmillante de questions …se présente l’introduction de la pulsion. J’espère qu’une part au moins importante de mon auditoire aura pu dans l’intervalle se reporter à ce texte,
sans que je m’attarde autrement à pointer les véritables falsifications dont elle fourmille. Néanmoins, même à une première lecture, la plus sommairement superficielle, vous aurez pu vous apercevoir que cet article… encore qu’il ne l’annonce pas au départ …est entièrement divisé en deux versants :
mais conformément à l’esprit de l’article : das Lieben, l’acte d’amour. Et qu’il est expressément formulé que l’amour ne saurait aucunement dans l’expérience, être confondu, être considéré comme le représentant, ce qu’on pourrait appeler Ganze, comme ce qu’il appelle, ce que FREUD articule, met en question, sous le terme de « die ganze Sexualstrebung », c’est–à–dire la tendance, les formes, la convergence de l’effort du sexuel, en tant qu’il s’achèverait en Ganze, en un tout saisissable qui en résumerait l’essence et la fonction. « Kommt aber auf damit nicht zuher ! » « Ça ne va pas du tout comme ça ! » s’écrie–t–il au moment de répondre à cette sorte de suggestion, en quelque sorte ambiante, et que nous avons rendue, nous autres analystes, par toutes sortes de formules qui sont autant de tromperies, comme étant ce qui justifie la fonction de l’appréhension du terme de l’autre, par la voie d’une série d’objtectalisations partielles. Tout l’article est, là, fait pour nous montrer qu’au regard de ce qu’on peut considérer, et de ce que FREUD, bien sûr considère comme étant la fonction finale de la sexualité, à savoir la reproduction, les pulsions telles qu’elles se présentent à nous dans le procès de la réalité psychique, sont des restes des pulsions… au regard de cette fonction finale définie en termes biologiques …restes des pulsions partielles. Les pulsions, dans leur structure, dans la tension qu’elles établissent, sont liées à quelque chose que nous pouvons appeler en l’occasion le facteur économique. Ce facteur économique dépend des conditions dans lesquelles s’exerce la fonction du principe du plaisir à un niveau que nous reprendrons, quand le moment sera venu de notre discours, sous le terme de Real–Ich. Disons tout de suite que ce Real–Ich, nous pouvons… dans une approximation rapide, mais que dès maintenant vous pouvez tenir pour exacte …nous pouvons le concevoir comme étant l’appareil nerveux, le système nerveux central, en tant qu’il fonctionne non pas comme un système de relation, mais comme un système destiné à assurer – des tensions internes – une certaine homéostase. C’est en raison de cette réalité de l’Ich, du système homéostastique, que la sexualité n’intervient, n’entre en jeu que sous la forme des pulsions partielles. La pulsion serait précisément cette sorte de montage par quoi la sexualité participe à la vie psychique d’une façon qui doit se conformer à la structure de béance qui est celle de l’inconscient. En d’autres termes, si nous plaçons aux deux extrêmes de ce qui est notre expérience analytique :
Refoulé et symptôme sont homogènes et réductibles à des fonctions de signifiants. Leur structure, quoi qu’elle s’édifie par succession, comme tout édifice, est quand même, au terme, au produit fini, inscriptible en termes synchroniques.
L’interprétation, dans son terme, pointe, non pas essentiellement les étapes de la construction, mais le désir auquel… dans un certain sens, dans le sens du vecteur que j’essaie ici de vous faire sentir …elle est identique. Le désir c’est en somme l’interprétation elle–même. [ Cf. Séminaire 1958-59 : Le désir et son interprétation ]
à proprement parler, ce qui y constitue la présence, le Dasein de la sexualité. La lisibilité du sexe dans l’interprétation des mécanismes inconscients est toujours rétroactive. Elle ne serait que de la nature de l’interprétation si, effectivement, à chaque instant de l’histoire, les pulsions partielles, nous ne pouvions d’elles être assurés qu’elles sont intervenues efficacement en temps et lieu. Et ceci non pas seulement comme on a pu le croire au début de l’expérience analytique, sous la forme en quelque sorte erratique, dispersée : bloc de glace errant, arraché à ce qui est… par rapport au développement de l’enfant …la grande banquise, la sexualité de l’adulte intervenant comme séduction sur un sujet immature. Si la sexualité s’est avérée tout de suite, et je dois dire avec une prégnance dont après coup on peut être surpris, à savoir que dès les Trois essais sur la théorie de la sexualité75, FREUD a pu poser comme essentiel ce qui lui est apparu alors comme perversion polymorphe, comme sexualité aberrante, comme rupture du charme d’une prétendue innocence, innocence infantile. Cette sexualité, pour s’être imposée si tôt, je dirai presque trop tôt, nous a fait passer trop vite sur l’examen de ce qu’elle représente en son essence. C’est à savoir :
L’intégration de la sexualité à une dialectique du désir passe par la mise en jeu de ce qui, dans le corps, méritera ici que nous le désignions par le terme d’appareil, si vous voulez bien entendre par là ce dont le corps, au regard de la sexualité, peut s’appareiller, ce qui veut dire que ceci est distinct de ce dont les corps peuvent s’apparier. Ce qui domine, à la lecture de ce texte de FREUD, se rassemble dans une expérience dont s’est donné à nous – de façon incroyablement précoce – comme une donnée et qu’on n’a pas eu le temps d’élaborer. Ce qui explique aussi tout cet embrouillis de la discussion autour des pulsions, comme sexuelles, des pulsions comme étant les pulsions du moi, et la variation de la frontière. Ce qui résout presque d’emblée le paradoxe… scandaleux pour certains, de ce qu’il ait fallu en venir au–delà des pulsions telles qu’on avait cru pouvoir les rassembler sous le titre des pulsions de vie comme de pulsions de mort …c’est qu’on ne voit pas ce qu’il en est de la pulsion. À savoir que s’il est vrai qu’elle représente… mais qu’elle ne fait que représenter et partiellement …la courbe de ce que veut dire chez le vivant l’accomplissement de la sexualité, comment s’étonner que son dernier terme soit la mort, puisque la présence du sexe chez le vivant est liée à cette mort ? Et si j’ai fait aujourd’hui reproduire au tableau cette citation : τῷ τόξῳ ὄνομα βίος, ἔργον δὲ θάνατος Plus exactement ce n’est pas une citation, c’est un fragment d’HÉRACLITE recueilli dans l’ouvrage monumental où DIELS a rassemblé ce qui nous reste – épars – de l’époque présocratique : … βιός [ bios ], écrit–il[l’arc : τῷ τόξῳ terme usuel synonyme de βιός] … et ceci nous émerge comme de ses leçons de sagesse dont on peut dire, qu’avant tout le circuit de notre élaboration scientifique, elles vont au but et tout droit … βιός [ bios ]… et à un accent près ce n’est pas la vie [βίος] mais c’est l’arc [βιός] …HÉRACLITE nous dit : « À l’arc est donné ce nom βιός [ bios ]… »… l’accent serait sur la première syllabe si c’était la vie …« …mais son œuvre, c’est la mort. » [ Cf. supra : note 73 du début de séance ] Ce que la pulsion intègre – et d’emblée – dans toute son existence, c’est une dialectique de l’arc, et je dirai même du tir à l’arc. C’est là seulement ce par quoi nous pouvons situer sa place dans l’économie psychique, ce qu’il importe de voir, dans ce que FREUD nous introduit par la voie, je dirai, elle–même des plus traditionnelles. Faisant usage à tout moment des ressources de la langue, et n’hésitant pas à se fonder sur ce quelque chose qui n’est pourtant caractéristique que de certains systèmes linguistiques, celui des trois voies : active, passive et réfléchie. Ceci pourtant n’est qu’une enveloppe où nous devons voir :
c’est–à–dire au niveau de chaque pulsion, l’aller et retour fondamental où elle se structure, entre deux pôles dont il est remarquable qu’il ne puisse les désigner qu’en termes de ce quelque chose qui est le verbe :
Mais ce que dès l’abord il pose, il nous présente comme étant fondamentalement acquis, c’est que nulle part de ce parcours, chaque pulsion partielle ne peut être séparée de son aller et retour, de sa réversion fondamentale : le caractère circulaire du parcours de la pulsion. J’insiste, pour définir le fonctionnement de ce montage qu’il introduit initialement, sur la dimension de cette Verkehrung. Mais quand il l’illustre, et nous verrons qu’il est remarquable de savoir quelle pulsion il va choisir pour l’illustrer, très nommément la Schaulust, la joie de voir, et ce qu’il ne peut désigner autrement que par l’accolement des deux termes « sado – masochisme ». Quand il parlera de ces deux pulsions, et plus spécialement de la troisième, il tiendra à bien marquer que ce n’est pas de deux temps qu’il s’agit dans ces pulsions, mais de trois. Il faut bien distinguer ce qui n’est que ce retour en circuit de la pulsion [ 2ème temps ], de ce qui apparaît… mais aussi bien de ne pas apparaître …dans ce troisième temps, à savoir l’apparition d’ein neues Subjekt, qu’il faut entendre non pas comme ceci : qu’il y en aurait déjà un… à savoir le sujet de la pulsion …mais que il est nouveau de voir apparaître un sujet. Et ce sujet, qui est proprement l’autre, apparaît en tant que la pulsion a pu fermer son cours circulaire, et ce n’est qu’avec l’apparition du sujet au niveau de l’autre que peut être réalisé ce qu’il en est de la fonction de la pulsion. C’est bien là–dessus précisément, que j’entends maintenant attirer votre attention. ![]() Ce circuit que vous voyez ici dessiné par la courbe de cette flèche… Drang [ poussée ] à l’origine …partante et redescendante, qui ici franchissant la surface constituée par ce que je vous ai défini la dernière fois comme le bord, considéré dans la théorie comme la source, la « Quelle » la zone dite érogène dans la pulsion, cette tension est toujours « boucle » et constitue, dans tout ce qu’elle soutient de l’économie du sujet, quelque chose qui ne peut être désolidarisé de son retour sur la zone érogène. Ici s’éclaircit le mystère du zielgehemmt, de cette forme que peut prendre la pulsion, d’atteindre sa satisfaction sans avoir pour autant atteint – quoi ? – son « but », en tant qu’il serait défini par la fonction biologique, par la réalisation effective de l’appariage reproductif. Mais ce n’est pas là le but de la pulsion partielle. Quel est–il ? Suspendons–le encore, mais penchons–nous sur ce terme de « but » et sur les deux sens qu’il peut présenter et que pour les différencier, j’ai choisi ici de noter par une langue dans laquelle ils sont particulièrement expressifs, l’anglais :
quelqu’un que vous chargez d’une mission, ça ne veut pas dire lui dire ce qu’il doit rapporter. Ça veut dire lui dire par quel chemin il doit passer …« the aim », c’est le trajet.
Le Goal ça n’est pas non plus dans le tir à l’arc, le but, ça n’est pas l’oiseau que vous abattez, c’est d’avoir marqué le coup, d’avoir atteint votre but. Ce qu’il en est de la pulsion est ceci :
Et ceci est présent dans FREUD. Quelque part, il nous dit que le modèle idéal qui pourrait être donné de l’auto–érotisme, c’est une seule bouche qui se baiserait elle–même. Comme tout ce qui se trouve sous sa plume : métaphore lumineuse, éblouissante même, mais dont on pourrait dire qu’elle ne demande peut–être qu’à être complétée d’une certaine question. Est–ce que dans la pulsion, cette bouche n’est pas ce qu’on pourrait appeler :
En tout cas ce qui force à distinguer cette satisfaction du pur et simple auto–érotisme de la zone érogène, c’est ce quelque chose que nous confondons trop souvent avec ce sur quoi la pulsion se referme. Cet objet qui n’est en fait que la présence d’un creux, d’un vide… occupable, nous dit FREUD, par n’importe quel objet …et dont nous ne connaissons l’instance que sous la forme de la fonction de l’objet perdu (a), celui dont il faut dire qu’il n’est pas l’origine de la pulsion orale. Il n’est pas introduit au titre de la primitive nourriture, il est introduit au fait de ce qu’aucune nourriture ne satisfera jamais la pulsion orale, si ce n’est à contourner cet objet éternellement manquant. Ce circuit, la question est seulement pour nous de savoir où il se branche, et d’abord :
de spirale,
à la pulsion orale, le stade suivant.
C’est déjà pousser bien loin la question pour des gens qui nous ont habitués à tenir, au nom de je ne sais quel mystère du développement, la chose comme déjà acquise, inscrite en quelque sorte dans l’éveil de possibilités organiques. Ceci paraît se soutenir du fait qu’effectivement, pour ce qui est de l’émergence de la sexualité sous sa forme « achevée », c’est bien en effet à un processus organique que nous avons affaire. Mais il n’y a aucune raison d’étendre ce fait à la relation entre les autres pulsions partielles. Il n’y a aucun rapport d’engendrement d’une des pulsions partielles à la suivante : le passage de la pulsion orale à la pulsion anale ne se produit pas par un procès de maturation, mais par l’intervention de quelque chose qui n’est pas du champ de la pulsion, par l’intervention, le renversement de la demande de l’Autre. Et si nous faisons intervenir les autres pulsions… dont la série peut être établie, et après tout résumée à un nombre assez court …il est tout à fait clair que vous seriez bien embarrassés de faire… entre la Schaulust, la pulsion scopique, voire ce que je distinguerai en son temps comme la pulsion invoquante …de faire le moindre rapport de déduction ou de genèse, de situer dans une succession historique, définissable en stades, sa place par rapport aux pulsions que je viens de nommer. Il n’y a aucune métamorphose naturelle de la pulsion orale en pulsion anale et quelles que soient, à l’occasion, les apparences que puisse nous donner le jeu du symbole que constitue, en d’autres contextes, le prétendu objet anal – à savoir les fèces – par rapport au phallus, dans son incidence négative, ceci ne nous permet à aucun degré… l’expérience nous le démontre …de considérer qu’il y a continuité de la phase anale à la phase phallique, qu’il y a rapport de métamorphose naturelle. La pulsion nous devons la considérer, comme FREUD nous l’indique, sous la rubrique de la konstante Kraft qui la soutient comme une tension stationnaire. Et jusqu’aux métaphores qu’il nous donne pour exprimer ces issues |
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