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Management stratégique des frontières et RSE : l’entreprise entre performance et responsabilité

Pierre MATHIEU
Maître de Conférences HDR

CRCGM (EA 3849)

Université Blaise Pascal

Résumé :
Ce travail nous semble s'inscrire parfaitement dans le débat majeur relancé spectaculairement par l'article de Porter M. & Kramer M. (2011) dans Harvard Business Review proposant de refonder l'analyse stratégique autour de la notion de shared value. L’objectif de cette contribution est en effet d’enrichir les réflexions académiques en proposant une analyse stratégique de la RSE. De nombreux travaux analysent les liens entre stratégie et RSE sous l'angle de Business Cases. Ils tentent ainsi de mettre en évidence les mécanismes créateurs d'avantages concurrentiels associés à des stratégies "orientées RSE". Notre propos est radicalement différent puisque nous suggérons de renverser l’argumentation en postulant que ce sont les orientations stratégiques que les firmes adoptent rationnellement dans des environnements concurrentiels évolutifs et complexes qui impliquent ou se traduisent par de profonds renouvellements des questionnements sociétaux auxquels elles sont confrontées. Nous montrons en effet que les principales orientations stratégiques actuelles des organisations –reconfigurations de leurs chaines de valeur- conduisent à des bouleversements considérables de leurs frontières et de leurs aires de responsabilité. Les entreprises se trouvent alors confrontées à des questionnements sociétaux toujours plus denses et complexes générés à la fois par les transferts de responsabilités directes (resserrement des frontières de la firme) et le développement de responsabilités indirectes (organisations réticulaires). Nous présentons, tout d’abord, les principales orientations stratégiques actuelles des entreprises et analysons leurs conséquences en termes de dynamique des frontières organisationnelles et des aires de responsabilité. Partant de ce renversement de focale, nous proposons ensuite une analyse de la problématique de la RSE fondée non plus sur un dilemme éthique ou moral mais essentiellement sur un double dilemme stratégique. Notre contribution se situe ainsi à l'articulation du champ conceptuel de la Corporate Citizenship et les recherches actuelles sur les frontières des organisations.

Mots clés : RSE, chaîne de valeur, stratégie corporateIntroduction

D’innombrables travaux ont été réalisés depuis une trentaine d’années sur le thème de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE). Les interrogations sur la place des organisations dans les sociétés sont très anciennes mais nous assistons actuellement à une résurgence massive de ces questionnements. Ils s’accroissent en effet d’autant plus que surgissent d’angoissantes préoccupations liées à des problèmes de raretés de ressources, de fortes externalités et de conflits majeurs entre des décisions privées et des intérêts collectifs et publics. Les exemples récents sont nombreux de stigmatisation de décisions privées produisant des externalités de plus en plus difficilement supportables par la collectivité : titrisation de créances « toxiques » à l’origine de la crise des subprimes, décisions brutales et difficilement justifiées de restructurations, de délocalisations et fermetures de sites, politiques de rémunérations des traders, utilisation de paradis fiscaux, dysfonctionnements des systèmes de gouvernance (Dessain, Meier & Salas, 2008), dégradation des écosystèmes (Reeves, 2003 ; Brown, 2007), exploitation déraisonnable des ressources naturelles (Le Cercle des Economistes & Orsenna, 2007), etc.

La publicité faite à ces problèmes et dysfonctionnements systémiques, de plus en plus argumentée et diffusée, renforce naturellement la suspicion à l’égard des organisations et de leurs décisions de gestion. Par exemple, l’appropriation et le traitement de ces problématiques par de nouveaux médias, en particulier la presse, internet voire le cinéma, renforcent la prise de conscience et le sentiment d’identification et d’empathie de la part des citoyens. Ces médias contribuent en effet indéniablement à forger des représentations des entreprises et de leurs dirigeants comme peinant de plus en plus à démêler les complexes écheveaux de contradictions dans lesquels ils se débattent constamment. Il nous semble ainsi que la pression sociétale ne s’est jamais exercée à un tel niveau de globalité et avec autant d’intensité. Parmi quelques exemples récents, nous pouvons citer les Prix Nobel de la Paix décernés respectivement en 2006 à Muhammad Yunus (développement du microcrédit) et en 2007 à Al Gore et au GIEC (lutte contre le réchauffement climatique), le Prix Nobel d’économie décerné en 2009 à Elinor Ostrom (gestion des biens publics) et Oliver Williamson (économie des coûts de transaction). Parmi d’autres dossiers moins médiatisés, les sommets du G20, réunis en urgence afin de faire face à la crise financière puis économique de 2008, se sont penchés prioritairement sur des pratiques privées considérées sociétalement comme non vertueuses : la question des paradis fiscaux (sommet de Londres d’avril 2009) et celle des bonus et des rémunérations variables (sommet de Pittsburgh en septembre 2009).

Comment l’analysent Porter & Kramer (2011), ces différents éléments illustrent une prise de conscience profonde et très largement partagée de la nécessité d’imaginer et de mettre en œuvre une gouvernance collectivement plus satisfaisante du système économique et des comportements des acteurs qui l’animent : “capitalism is under siege…Diminished trust in business is causing political leaders to set policies sap economic growth…Business is caught in a vicious circle… The purpose of the corporation must be redefined around creating shared value (p. 62-63)”. Les entreprises sont prioritairement questionnées mais les interrogations et attentes collectives se manifestent également à l’égard d’acteurs tels les pouvoirs publics, les institutions politiques nationales et internationales (ONU, FMI, OIT, etc.), les syndicats, les ONG, les consommateurs. Nous postulons que cette demande sociétale croissante n’est pas un épiphénomène mais constitue une évolution profonde de nos sociétés contemporaines.

La publication du « Oxford Handbook of Corporate Social Responsibility » par Crane, et al. (2008a) témoigne du degré de maturité que ce corpus a atteint en quelques décennies et valide nonobstant la pertinence et l’urgence de la RSE comme champ programmatique de recherches. Dans leur introduction, Crane, et al. (2008b) rappellent en effet le développement extraordinaire des travaux et des publications sur ce thème. Ils soulignent l’institutionnalisation de la RSE comme champ de recherches et de connaissances en s’appuyant sur divers éléments. Tout d’abord, à partir, entre autres, de l’analyse bibliographique proposée par Lockett, et al. (2006), ils analysent les nombreuses contributions traitant de la RSE et constatent le nombre considérable de publications fondamentales dans les principales revues généralistes. Ils soulignent également le rôle essentiel de différentes revues ou journaux spécialisés dans le champ de la RSE en notant, outre les publications nord-américaines, l’émergence d’éditions européennes (par exemple la Revue de l’Organisation Responsable). Un autre élément caractéristique de l’institutionnalisation du champ de la RSE est la constitution de sociétés savantes (Mercier, 2004, p. 7 et 8). Crane, et al. (2008b) soulignent enfin la prise en compte croissante de la problématique RSE dans de multiples formations de haut niveau en management.

Pourtant, après quelques décennies de travaux très intenses et approfondis, force est malheureusement de constater que le développement spectaculaire de ce champ académique tarde à produire des effets tangibles sur les organisations et leurs pratiques. Les stratégies de recherches évoluent aujourd’hui vers des tentatives de mises en perspectives beaucoup plus larges empruntant à des champs disciplinaires auparavant cloisonnés (en particulier, et sans viser à l’exhaustivité, l’économie, le droit, les sciences politiques, la philosophie, la sociologie). Les deux publications structurantes de Crane, et al. (2008a) et de Scherer & Palazzo (2008) traduisent très clairement cette évolution. Elles posent en effet les jalons d’un futur modèle élargi d’analyse de la Citoyenneté d’Entreprise. Ces deux ouvrages dessinent ainsi une carte renouvelée des recherches sur la place et le rôle des organisations productives au sein de nos sociétés dans un contexte de mondialisation, de globalisation des économies et de développement de firmes transnationales.

La question du lien entre la RSE et la stratégie est abordée principalement dans la littérature managériale sous l’angle de l’étude de l’intérêt stratégique de la RSE et de la motivation à adopter des comportements vertueux plus éthiques et moraux. Par exemple, l’agenda que McWilliams, Siegel & Wright (2006) proposent en introduction d’un numéro spécial du Journal of Management Studies1 s’articule autour de la recherche des leviers de performance associés à la RSE (différenciation, accroissement des ressources fondamentales, investissement stratégique…). Il s’agit ainsi de susciter l’adoption de stratégies orientées socialement responsable en mettant en évidence les mécanismes vertueux qu’une telle évolution peut générer pour l’entreprise. On retrouve cet objectif, entre autres, dans la contribution récente de Kurucz, Colbert & Wheeler (2008) ainsi que dans le modèle microéconomique de la RSE proposé par Lundgren (2011).

Notre propos est radicalement différent puisque nous suggérons de renverser l’argumentation en postulant que ce sont les orientations stratégiques que les firmes adoptent rationnellement dans des environnements concurrentiels évolutifs et complexes qui impliquent ou se traduisent par de profonds renouvellements des questionnements sociétaux auxquels elles sont confrontées (Mathieu, 2011). L’objectif de cet article est ainsi de proposer une originale mise en perspective stratégique de la notion de RSE. Tout d’abord, nous présenterons les principales orientations stratégiques actuelles des entreprises et analyserons leurs conséquences en termes de dynamique des frontières organisationnelles. Les orientations stratégiques adoptées conduisent en effet à des bouleversements considérables des frontières et, par là, des aires de responsabilité. Partant de ce renversement de focale, nous proposerons alors une analyse de la problématique de la RSE fondée non plus sur un dilemme éthique ou moral mais essentiellement sur un double dilemme stratégique.
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