François Vincent Coindre

Travail de recherche,
F. Marius Drevet, SC François Vincent Coindre
Avant propos
Le Père André Coindre disparu n'est plus le guide des Frères ici-bas. Mais la vie de l'Institut continue.
Les Frères, se trouvant orphelins et connaissant d'ailleurs les intentions du Fondateur, se réunirent pour procéder à la nomination d'un nouveau supérieur; le Père François Vincent Coindre fut élu.
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Poursuivons la chronique du Pieux-Secours, sous le supériorat de François Vincent Coindre. Nous y intégrerons les grands événements de l'Institut qui ont dû, à n'en pas douter, avoir des résonnances profondes au Pieux-Secours. Il en sera d'ailleurs ainsi sous les supérieurs suivants.
"...Adieu, mes bien chers Frères, vous pour qui j'ai passé vingt ans de ma vie n'ayant pour toute ambition que de vous voir réussir et prospérer, vous que j'ai toujours portés dans mon cœur et pour lesquels il n'y a pas de sacrifices que je ne me sois imposés...
C'est au Coeur de Jésus que je vous interpelle tous. C'est dans ce Cœur que vous vous souviendrez de celui que vous avez si longtemps appelé votre Père et qui sera toujours votre ami..." Lettre de démission: 20 août 1841
St I 111
AU TEMPS DU R.P. FRANCOIS VINCENT COINDRE 2e supérieur général: 1826/1841
Premières années Douze ans après la naissance de leur aîné, André, notre Fondateur, les époux Vincent Coindre et Marie-Françoise Mifflet faisaient baptiser leur cadet, François-Vincent, né le 27 avril 1799. Ce sera notre Père François, deuxième Supérieur général. Il signait habituellement de son double nom; quand il n'en mentionnait qu'un, c'était François.
St I 76
Acte de naissance du 9 floréal an VII (=28/04/1799) Aujourd'hui neuf floréal l'an septième de la République française une et indivisible, par devant moi François Philippe (Pagé ou Papet), officier public de l'administration municipale de Lyon division du Midi, a comparu le Citoyen Vincent Coindre, tailleur d'habits, rue de la Poulaillerie, lequel assisté de François-Louis Déduit, commis mercier, rue Tupin et de Françoise Mifflet, femme de Louis Déduit, plieuse de fil même rue, m'a déclaré que Marie Mifflet, son épouse est accouchée hier matin à une heure dans sondit domicile, d'un enfant mâle qu'il m'a présenté et auquel on a donné les prénoms de François-Vincent d'après laquelle déclaration moi, officier public, ai rédigé le présent acte que l'un des deux susdit témoins a signé avec le comparant et moi, non l'autre qui a déclaré ne le savoir de ce enquis.
Coindre Déduit
A.D. Lyon midi 4E 2321 n° 1479) (c.f. A. 43,8) Il avait quatre ans quand l'église de sa paroisse, Saint-Nizier, fut réaffectée au culte catholique. Plus favorisé que son aîné, il a donc pu pratiquer ouvertement sa religion.
Comment s'est déroulée son enfance? quelle école primaire a-t-il fréquentée? quand a-t-il fait sa première communion? a-t-il été élève de l'école cléricale de Saint-Nizier? Nous l'ignorons.
c.f. dernière minute p. 196)
A l'automne 1811, il entrait en "sixième" au petit-séminaire Notre-Dame-de-l'Argentière, près de Lyon. Il y est demeuré sept ans, juqu'à la classe de Philosophie I comprise.
St I 76
Au Petit séminaire de l'Argentière: 1811/(1818?) Année scolaire 1811/1812: classe de 6ème M.Recorbet, supérieur, était heureux de voir la bonne marche du séminaire de l'Argentière et il était loin de s'attendre à l'épreuve qui l'attendait...
Soudain, le dimanche 13 janvier 1811, il est arrêté sur ordre du Ministre de la Police, emprisonné à Paris, mis au silence. Le 25 mars, la décision de sa Majesté est notifiée au prisonnier: il doit donner sa démission de supérieur de l'Argentière... (voir annexe 3 p.207)
L'abbé de la Croix fut appelé à lui succéder. Note. Né à Proprières (Rhône) le 15 juillet 1779, Nicolas-Augustin de la Croix d'Azolette s'était de bonne heure distingué par une intelligence vive, une piété réfléchie, un jugement sûr. Son père voulait le faire entrer à l'Ecole polytechnique; il se résigna à aller à Paris, mais pour y étudier la médecine, et bientôt, sollicité par la grâce, il entrait au Séminaire de Saint-Sulpice; sa santé ne lui permit pas d'y finir toutes ses études, qu'il acheva comme il put chez son oncle, curé d'Azolette. Vicaire à Belleville (1806), curé de Fareins (Ain,1808), où il opéra plusieurs conversions éclatantes, il était depuis 1809 Supérieur du Petit Séminaire d'Alix lorsqu'il vint à l'Argentière.
Nous le voyons ensuite Supérieur du Grand Séminaire de Lyon (1813/1817), dont les Sulpiciens ont été chassés par le gouvernement, puis préposé général de la Société diocésaine naissante des Prêtres de Saint-Irénée (dits Chartreux), curé de Saint-Bruno, vicaire général de Mgr Devie à Belley (1823), évêque de Gap (1837), archevêque d'Auch (1840). Il serait devenu archevêque de Paris si, à la mort de Mgr Quelen, il n'avait pas résisté énergiquement aux instances de M.Martin du Nord. Ses mérites n'étaient égalés que par sa modestie.
Mgr de la Croix donna, en 1859, sa démission et vint se retirer aux Chartreux, dans une humble cellule des anciens cloîtres, "pour préparer, disait-il, son éternité". Il fit en 1861, la mort d'un saint.
En donnant à l'Argentière ce jeune supérieur de trente-deux ans,, M.Bochard et le Cardinal faisaient donc un choix des plus heureux, d'autant plus que des temps difficiles s'annonçaient pour les petits séminaires.
Napoléon, de jour en jour plus autoritaire, caressait le rêve de tous les pouvoirs despotiques.Situation, honneurs, places, avancement, fortune et disgrâce, vie et mort des citoyens, il tenait déjà tout cela pour ainsi dire dans sa main; il lui fallait plus encore: leur pensée, leur conscience, leur âme même. L'aboutissant fatal de tels désirs était la conception d'une Eglise nationale et l'établissement du monopole universitaire.
Note."Dans l'établissement d'un corps enseignant, déclarait Napoléon, mon but principal est d'avoir un moyen de diriger les opinions politiques et morales." Taine, Origines de la France contemporaine.
Hachette, 1901, tome II p 196 Les séminaires étaient un obstacle à la réalisation de ce double projet, donc, un jour ou l'autre, ils devaient disparaître.
Dès 1809 se multiplient les mesures qui ont pour but de les accoupler à l'Université. Leurs élèves sont obligés de lui payer l'impôt du vingtième sur le prix de la pension; elle voudrait se lier les supérieurs et professeurs en les astreignant à signer des déclarations et des engagements.
Note. D'après les conseils de l'Archevêché des 9 et 13 août 1809 et du 3 janvier 1810, les supérieurs des séminaires du diocèse ne voulurent rien signer sans d'expresses réserves sauvegardant la dignité et la liberté de leur conscience; ces réserves furent acceptées par le grand Maître de l'Université. Peu après, le 25 février 1810, parut le décret impérial reproduisant l'édit de 1682 de Louis XIV, et défendant d'enseigner ou d'écrire "aucune chose contraire à la doctrine contenue" dans la déclaration du clergé français. (Taine, Origines de la France contemporaine. Hachette, 1901, tome I page 38)
Enfin, la même année,un décret impérial du 9 août ordonne que, "pour être admis dans les séminaires,(les grands séminaires), les élèves devront justifier qu'ils ont reçu le grade de bachelier de la Faculté des Lettres". Pour obtenir ce diplôme, il faut être âgé au moins de seize ans et répondre sur tout ce qu'on enseigne dans les hautes classes des lycées.
Une délibération du Conseil de l'Université du 23 novembre 1810 détermina les formes à suivre "pour donner le grade de bachelier aux jeunes gens destinés à l'état ecclésiastique, dans les arrondissements académiques où il n'y avait pas encore de Facultés de Lettres établies". En vertu de cette délibération, M. de la Croix reçut, le 23 juillet 1811, M.Nompère de Champagny, recteur de l'Académie de Lyon. "Il se rendit à l'Argentière avec M. l'abbé Bochard, vicaire général, docteur en Sorbonne. Ils firent ensemble subir des examens sérieux aux élèves les plus capables de la classe de Mathématiques. A la suite de l'examen, Louis Duplay (le futur supérieur du Grand Séminaire) et quelques-uns de ses camarades, furent pourvus du diplôme de bachelier."
L'Université voulait aussi que peu à peu l'enseignement fût interdit dans les séminaires, aux professeurs qui n'auraient pas reçu de diplômes.
Note. Pour ménager la transition, elle conférait les diplômes aux professeurs actuels sur simple demande de leur évêque.
Mais les choses allaient trop lentement au gré de l'Empereur, car de plus en plus il suivait les fatals conseils de la faction irréligieuse. "Fermez-lui disait-on, les petits séminaires, faites donner à tous leurs élèves le seul enseignement qui soit conforme à nos idées, c'est le seul moyen de vous rendre maître du clergé qui vous échappe". Les séminaires devinrent donc comme son cauchemar, et le 15 novembre 1811, il signa le décret qui prescrivait de les fermer, en exigeant, d'autre part, que les élèves ecclésiastiques suivraient les cours de l'Université.
Note. Décret du 15 novembre 1811, articles 28,29,32:"A partir du 1er juillet 1812, toutes les école secondaires ecclésiastiques (petits séminaires) qui ne seraient point placées dans les villes où se trouve un lycée ou un collège, seront fermées. Aucune école secondaire ecclésiastique ne pourra être placée dans la campagne. Dans tous les lieux où il y a des écoles ecclésiastiques, les élèves de ces écoles seront conduits au lycée ou au collège pour y suivre les classes." (Taine, Origines de la France contemporaine.
Hachette, 1901, tome III page 42) L'Argentière, avec les Pères de la Foi et M. Recorbet, et par le fait même de ses succès, avait eu le périlleux honneur d'attirer spécialement son attention; "pourquoi, écrivait-il le 20 novembre 1811 au comte de Montalivet, ministre de l'intérieur, pourquoi les habitants de Lyon n'envoient-ils pas leurs enfants au Lycée, et pourquoi les envoient-ils à l'Argentière?"
Cependant l'Empereur consentit à surseoir un peu à l'exécution de son décret; l'année scolaire 1811/1812 se continua sans graves incidents pour l'Argentière qui eut la joie de recevoir, pour la première et dernière fois sans doute, le cardinal Fesch...
Il s'y rendit après avoir visité Saint-Symphorien, Chazelles et Saint-Galmier, et arriva par une belle journée du mois de mai, traîné princièrement par quatre superbes chevaux blancs. Tous les élèves se portèrent à sa rencontre.
Le lendemain, c'était dans toute la vallée de l'Argentière une animation extraordinaire: de longues processions se déroulaient dans les chemins bordés de grands chênes et de haies en fleurs, les terrasses du Séminaire étaient envahies par la foule, et tous les échos retentissaient du chant des cantiques; le Cardinal donnait, dans la chapelle magnifiquement décorée, le sacrement de Confirmation aux nombreux élèves qui ne l'avaient pas encore reçu, et aux fidèles plus nombreux encore des paroisses environnantes.
L'année scolaire s'acheva comme de coutume. Déjà un concours général avait été organisé entre les classes de tous les petits séminaires du diocèse, et la Rhétorique de l'Argentière se distingua; nous lisons en effet en tête d'un palmarès de 1812 écrit à la main:
In Rhetorica, MAGUM PRAEMIUM, ex concursu omnium eloquentiae candidatorum in singulis minoribus Seminariis studentium, meriti ac consecuti sunt:
Ludovicus Rondot, de l'Argentière; J.Simon Barras, de Meximieux.
1° Accessit: Victor Dumarsais, de l'Argentière; J.-M. Ballet, de Meximieux.
2° Accessit: Henricus Mouche, de l'Argentière; Nicolas Chervin, de Saint-Jodard.
Les autres classes ne réussirent pas aussi bien, car dans ce même palmarès il n'y a plus à l'actif de l'Argentière qu'une nomination: un accessit de narration française en classe d'Humanités. 1811/1812 Cette année-là, François-Vincent Coindre est entré en 6e.
Il y a 340 élèves; sur les 122 élèves de physique et de logique 110 sont mentionnés avec la mention: vocation ecclésiastique;
la classe de 6e compte 27 élèves.
Personnel: Merle Antoine, directeur
préfet des récréations: Mazenod J.-Cl.
L.A. 422 et X Extraits du rapport de M.Bochard, vicaire général, sur les Séminaires du diocèse de Lyon, pendant l'année 1811/1812 L'an 1812, et le 8 avril, séance en Conseil, en présence de S.Altesse Eminentissime,et de MMrs Courbon, Renaud, Bochard,Cabarat, Dequelen, Feutrier.
M. Bochard a rendu le compte suivant des séminaires:
1° Ils se divisent encore, au moment où est fait le rapport, en Grand et Petits Séminaires, le grand pour les études théologiques, les autres, au nombre de six, pour les études préparatoires.
2° Dans les uns et dans les autres, la sagesse et la bonne conduite, l'émulation, l'amour de l'étude, les efforts pour y réussir, et les succès qui les accompagnent, donnent de vraies consolations et font un grand objet d'admiration pour tous ceux qui sont attentifs; surtout pour ceux qui voient les choses de près, et approfondissent le bien qui se fait dans ces pieux établissements. Quoique resserrés pour la plupart comme en des réduits, en des lieux presque inaccessibles qui en font de vraies thébaïdes dérobées à tous les regards, ils sont cependant aperçus du public même, dont l'enthousiasme et le tendre attachement pour ces maisons augmentent chaque jour, malgré l'orage qui les menace. Qui peut en douter, à voir l'empressement avec lequel on y sollicite encore des places, de toute part, et à la constance avec laquelle chacun de ceux qui y sont s'est bien gardé d'en désemparer.
3° Ce qui provoque et opère tout ce bien, c'est le bon choix des maîtres, la piété et le zèle qui les guident, la ferveur qui les anime, l'active surveillance qu'ils ne se lassent pas d'employer, la nuit, souvent comme le jour, la bonne marche qui leur est tracée de longue main, la puissante impulsion qu'ils ne cessent de recevoir de l'autorité première, le coup d'oeil de cette autorité qui ne les perd jamais de vue, et ils le savent; les fréquentes visites qu'ils en reçoivent, lesquelles, expérience bien acquise, n'ont jamais été sans de grands fruits. Enfin, la fermeté douce, mais inflexible, d'une part, et de l'autre la docilité, à la fin obtenue, au point le plus édifiant..
Il fut un temps où chaque supérieur était presque le souverain de sa Maison... les jeunes professeurs, à leur tour, faisaient la part, la loi à chacun... Ce n'est que par quelques coups de vigueur, brusquement et rapidement portés dans le principe, qu'on a enfin tout amené au vrai, au juste et légitime point. De là, que d'avantages!... Rien n'arrête plus aucune opération, et, au premier signal, tout se remue, tout obéit, tout marche. Edifiant concert, admirable unité, qui de tous ces établissements n'en font pour ainsi dire qu'un seul et même! Quel dommage de détruire ce qui est si beau, si rare, et qu'on a eu tant de peine à fonder solidement! Aujourd'hui tout est fait et, d'un mot, s'établissent les rapports les plus exacts, les plus rapides, sans contrainte et sans efforts. Puissent ceux qui dirigent ces grandes oeuvres ne pas perdre de vue ces observations et ces faits, c'est pour eux surtout qu'on les retrace.
4° On avait déjà beaucoup fait en tirant ces établissements des profonds réduits où ils étaient nés, au sein même et sous la main de la persécution... mais tout ne se fait pas en un jour, tant d'autres soins absorbaient le zèle des premiers restaurateurs, et les éléments des Séminaires étaient encore si informes, qu'on ne put d'abord monter que faiblement les études... aussi, ce ne fut qu'après trois ans d'observations et de dispositions préliminaires que furent donnés les règlements qui établissaient enfin une marche uniforme, régulière et ferme. Le premier règlement fut celui des Directeurs et Professeurs, le second celui des Elèves, le troisième qui lie tout le reste, Le Manuel avec tous ses corollaires.
Les résultats du Manuel sont d'abord... de fortifier l'étude des langues, en conformité à la marche ancienne et aux principes des Rollin, des Fleury, des Jouvency... Chaque jour les élèves apprennent un leçon de Géographie et une autre d'Histoire, et chaque semaine ils ont une récapitulation et un développement, en classe, de leurs diverses leçons; chaque jour ausssi, excepté le dimanche et les congés, ils ont une classe de Doctrine d'une demi-heure, et, de temps en temps, des classes de Chant, et de plus un exercice pour les Cérémonies tous les dimanches. Tout ceci semblerait au premier coup d'oeil accablant pour les enfants, mais l'ordre des exercices journaliers est tellement disposé que rien ne se nuit, ne se surcharge ni ne se cumule...
Les leçons de Doctrine commencent par les éléments, le catéchisme en est la base, et cette première espèce d'instruction est pour les plus jeunes élèves, jusqu'en 6e.- Aux classes plus élévées jusqu'en 3e, la religion est présentée sous le point de vue historique, à l'aide du catéchisme de Fleury. - Aux autres classes, jusqu'en Rhétorique, elle est présentée sous le point de vue doctrinal, à l'aide du catéchisme du Concile de Trente. - Enfin, elle est montrée aux Philosophes, sous le point de vue polémique. Il est évident que les élèves, par cette méthode, ne doivent arriver à Saint-Irénée qu'avec un vrai code de théologie, déjà gravé dans leur tête.
... L'expérience, cette grande maîtresse, a fait gagner amplement son procès au Manuel. Que le temps n'est-il donné pour affermir sa marche et propager ses fruits! Au lieu de ces diverses connaissances, si propres à de jeunes clercs, que vont-ils peut-être apprendre bientôt? des mathématiques, depuis le rudiment jusqu'aux dernières leçons de Rhétorique..Et ces moeurs, cette innocence et cette candeur que tant de soins gardaient, que vont-elles devenir dans les nouvelles situations qu'on devine pour les enfants? Et leur vocation combien durera-t-elle, au milieu de ces huées, de ces vociférations, qui les accompagneront dans les nouvelles écoles dont on les menace!
5° Passons à ce qui concerne les finances. Sept grandes Maisons [Ces sept grandes Maisons étaient: le grand Séminaire de Saint-Irénée, l'Argentière, Saint-Jodard, Verrières, Roche, Alix, Meximieux] offrent près de 1 400 élèves qui, pour la plupart, demandent du pain. Quelle famille à nourrir! Il faut pourtant fournir à tous les besoins, et faire exister tous les Maîtres, et acheter ou réparer tous les édifices, et entretenir tous les mobiliers. La charité des fidèles est grande, sans doute, mais combien elle serait insuffisante, si elle était seule!
La masse des Maisons a offert, l'an dernier, une dépense de 320000fr. (les aumônes des fidèles ne fournissent pas le cinquième de cette somme). Mais tous les moyens de sagesse, d'économie et de désintéressement sont employés pour y suppléer. Les Supérieurs et Professeurs se contentent du victum et vestitum...
Note. Ici le rapporteur fait ressortir tous les avantages pécuniaires que présentent les Séminaires installés à la campagne. L'Argentière , sans rien demander à la caisse, avec 169 payants, fait vivre 98 élèves gratuits et 65 demi-gratuits, en tout 332 élèves, et paye de plus 1 058 fr. par trimestre à l'Université...
Note. En mars 1812, il y avait, d'après ce rapport de M.Bochard, 332 élèves à l'Argentière, 230 à Verrières, 201 à Saint-Jodard, 179 à Meximieux, 130 à Alix, 111 à Roche et 186 à Saint-Irénée. Il n'y avait à Saint-Irénée que 19 élèves payants, et 28 demi-payants, contre 139 gratuits, et la caisse diocésaine avait à payer, cette année-là, plus 40 000fr. pour les élèves du grand Séminaire. 6° Mais abordons maintenant chaque Maison en particulier. Il est évident que, de tous les Petits Séminaires, l'Argentière est celui qui présente le plus bel ensemble: 125 philosophes et plus de 200 autres élèves, pour la plupart bien nés et bien élevés, et disséminés depuis la 8e jusqu'en rhétorique, et se formant sous des maîtres actifs, vigilants et d'un zèle infatigable, à toutes les parties énoncées ci-dessus; s'y livrant de tout leur coeur et pleins d'émulation et de courage, de moeurs et de la plus tendre et plus édifiante piété; n'aspirant tous les jours qu'à des progrès nouveaux. C'est là, sans doute, un de ces spectacles qu'on ne rencontre presque plus que par miracle; l'ancien régime lui-même ne l'offrait pas.
Cela ne veut pas dire que l'Argentière soit parfait. Au milieu de cette masse édifiante de bons élèves se rencontrent pourtant des enfants légers, étourdis, peut-être même quelques vicieux. Le plus grand nombre des élèves de cette maison sortant des villes, en a la bonne tenue, l'honnêteté, les bonnes qualités, mais quelques-uns aussi peuvent en avoir apporté et conservé les vices. Ces enfants d'ailleurs ainsi nés, sont d'un caractère plus facile et moins tenace pour l'étude, comme pour toutes choses; mais leurs formes plus polies en inspirent de meilleures aux philosophes qui souvent en ont besoin, comme la gravité de ceux-ci donne à la longue plus d'aplomb aux autres...
L.A 432/434
Après la distribution des prix, maîtres et élèves se demandaient avec anxiété s'ils pourraient rentrer de nouveau dans leur cher Séminaire, s'ils ne devaient pas lui dire un dernier adieu.
L.A. 135/140 -X -XIV
Note. Dans les listes de 1810,1811, 1812, nous trouvons inscrits, comme élèves, trois des futurs supérieurs de la Maison: Joseph Beaujolin,, Justin Fornier et Pierre-Jean-Mathias Loras; celui-ci devait devenir évêque, les 2 autres vicaires généraux.
Signalons aussi: Louis Rossat et Dominique Dufêtre, les futurs évêques de Verdun et de Nevers; Louis Tabert, mort évêque de Cochinchine et Charles Maléchard, un des plus brillants officiers de l'armée d'Afrique.
L.A. 147 1812/1813. et 1813/184
En 1812, François Vincent Coindre entre en 5ème.
Hélas! les tristes prévisions se réalisèrent. Rebelle à tous les conseils raisonnables et à toutes les interventions, l'Empereur ne différa plus l'exécution de son décret: les petits séminaires ne rouvrirent pas leurs portes après les vacances, et les vastes bâtiments de l'Argentière, mis sous le scellé impérial, demeurèrent inhabités; l'accès de la chapelle fut, dit-on, interdit même aux habitants du village.
Dès le début de la crise, le Cardinal s'était occupé de préparer les mesures nécessaires pour atténuer, autant que possible, les effets désastreux de la décision qui menaçait de tarir dans ses sources vives le recrutement sacerdotal. "M. Courbon, son premier grand vicaire, homme de ressource dans toutes les graves circonstances, habile à tirer parti avec un imperturbable sang-froid de tous les événements, fut chargé d'examiner, de concert avec ses deux collègues, les localités du diocèse où l'on pourrait réunir, avec le moins d'inconvénients, les jeunes gens qui sortaient des séminaires, afin de leur faire suivre en qualité d'externes les classes des collèges." Car de placer comme internes dans les établissements de l'Université les aspirants au sacerdoce, Mgr Fesch ne voulait en entendre parler à aucun prix: "Non, non, disait-il, l'Université c'est comme une grande caserne: on y élève des soldats, et moi je veux des prêtres". Ce qu'il redoutait surtout pour ses jeunes séminaristes c'était, avec le contact des lycéens, l'esprit plus ou moins irréligieux d'un trop grand nombre des professeurs de l'Etat.
Après mûre réflexion, il fut arrêté que le Séminaire de Verrières, le plus isolé de tous et surveillé de moins près par le Gouvernement, resterait ouvert et recevrait tous les étudiants de philosophie et de mathématiques, mais seulement ceux-là, " et comme on craignait, dans ce bouleversement, que le recrutement du clergé diocésain ne subît une interruption trop sensible, quelques-uns des plus forts élèves, choisis dans les classes d'Humanités et même de Troisième furent immédiatement envoyés en Philosophie". Quant aux autres élèves des Séminaires de l'Argentière, Saint-Jodard, Alix, Meximieux, Verrières même, ils furent répartis entre les villes de Roanne, Saint-Chamond, Villefranche, Bourg et Belley... Logés dans des maisons particulières peu éloignées les unes des autres et choisies avec soin par le clergé paroissial, ils restaient sous le surveillance d'ecclésiastiques, et un censeur les conduisait régulièrement aux cours. On nomma un supérieur pour chacune de ces localités: M. Chevallon, à Villefranche; M. Deplace, à Roanne; M. Greppo, qui est mort grand vicaire de Belley, à Bourg; M. Barret, à Belley; M. Marion, à Saint-Chamond. Tous les jours le censeur rendait compte de la conduite de ses subordonnés au supérieur, qui lui-même visitait sans cesse les divers groupements de séminaristes, et faisait observer, dans la mesure du possible, la règle des séminaires.
Les élèves de l'Argentière qui ne furent pas désignés pour Verrières allèrent en grande partie à Saint-Chamond, où ils retrouvaient comme supérieur un de leurs maîtres les plus aimés, M. Marion. Un certain nombre aussi se rendirent à Villefranche, dont le collège avait alors pour Principal M. l'abbé Carreaux, ancien professeur de l'Argentière.
Registre donnant l'état des petis séminaristes pendant l'année 1812/1813.
Ils étaient à Verrières 248 (16 en classe de Mathématiques, 102 dans une première division et 130 dans une seconde division de Philosophie). A Saint-Chamond, 100; à Roanne, 107; à Villefranche, 101; à Belley, 65; à Bourg, 35; à Lyon, 152, dont 60 à Saint-Jean, où il n'y avait eu qu'à transformer l'organisation du petit Séminaire pour faire suivre aux élèves les cours du Lycée. Note.* Les 92 autres élèves séminaristes de Lyon se répartissent ainsi: 14 à Saint-Pierre; 20 à Saint-Nizier; 16 à Saint-François-de-Sales; 19 à Notre-Dame de Saint-Louis; 14 à Saint-Just; 6 à Saint-Paul; 3 à la Croix-Rousse.
Il est vraisemblable que François Vincent Coindre fit partie des 152.
Le F.Stanislas, dans "supérieurs généraux", p 76, dit qu'à l'automne 1811, il entrait en 6e au petit séminaire Notre-Dame de l'Argentière près de Lyon, qu'il y est demeuré sept ans jusqu'à la classe de Philosophie I comprise.
Cependant on ne voit pas bien comment concilier cette assertion avec les faits cités ci-dessus. Quelques étudiants ecclésiastiques du diocèse suivaient les cours aux collèges de Montbrison, Thiers, Annonay et Nantua.
Les prêtres des paroisses de campagne furent admirables; ils cumulèrent avec leurs autres fonctions les charges du professorat et de l'éducation cléricale, instruisant à eux seuls, plus de trois cents enfants ou jeunes enfants, auxquels ils faisaient suivre, de leur mieux, soit le programme des classes élémentaires, soit même celui des classes élevées, jusqu'à la Seconde inclusivement. 23 curés du département du Rhône se partagèrent ainsi une soixantaine d'élèves et 66 curés du département de la Loire en avaient près de 200; 12 curés de l'Ain en instruisaient 66. Quelques-uns tenaient de véritables écoles: M. Ribier, curé de Larajasse, avait 15 élèves; M.le curé de Châtelus, 9; M.Brunel, curé de Roche, 12; M. Briery, curé de Saint-Jodard, 12; M. le curé de Châtillon-de-Michailles, 26; M. Perrodin, curé de Couromangoux, 6; M. Préher, curé de Véranne, 9; M.Poriol, curé de Lupé,9; M.Moyne, curé de Perreux,10; M.Rousset, curé de Saint-Bonnet-le-Châteu, 6, etc.
On voit par ce qui précède, combien furent mouvementées pour l'Argentière comme pour les autres petits séminaires, les premières années du XIXe siècle. C'était la période de formation avec ses essais, ses changements et des difficultés de tout genre. Il avait fallu créer, et, lorsque, au prix de l'initiative la plus intelligente et des plus grands efforts, tout fut établi, le décret du 15 novembre 1811, vint brutalement tout désorganiser et tout remettre en question. Cependant, et que cet exemple nous encourage, rien ne put lasser la persévérance indomptable des fondateurs de ces oeuvres bénies; malgré tout ils espéraient en l'avenir qui du reste leur donna bientôt raison, et déjà ils jouissaient des résultats féconds obtenus: le diocèse de Lyon était un des moins dépourvus de prêtres et d'étudiants ecclésiastiques.
L.A 143/146
Personnel: Déplace Marie-Apollon: supérieur
Chevallon Cl.F.: préfet d'études (1813/1816)...
L.A. 422/423 Note. M. Menaide fut en 1812 professeur de 5e (à l'Argentière?) n'étant encore que diacre. Après avoir été vicaire à Châtillon et à Saint-Martin de Fontaine, il fut nommé Directeur à Meximieux et en 1822 il vint exercer les mêmes fonctions à l'Argentière; il y occupa ce poste jusqu'en 1856.
L A 182
Nommé supérieur de la Maison de Retraite des prêtres, à Vernaison, il mourut en 1871.
L A 191/192
En 5e, F.V. Coindre est moyennement noté B ou b en conduite, f en science, b ou c , ailleurs.
R 41
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