Bibliographie citée (p. 77-79)








télécharger 1.84 Mb.
titreBibliographie citée (p. 77-79)
page39/39
date de publication23.03.2017
taille1.84 Mb.
typeBibliographie
ar.21-bal.com > histoire > Bibliographie
1   ...   31   32   33   34   35   36   37   38   39

arable de cette portion du désert libyque. En effet, même si on considère l’Iran comme seulement un

relais pour sa diffusion 6, on remarque que sa propagation fut d’autant plus facilitée que l’ouvrage a été

implanté dans une Égypte insérée dans un cadre territorial supérieur 7. Il est ainsi l’ouvrage spécifique

d’une terre d’Empire, appartenance qui, sans considérer les conditions du milieu local favorables à son

implantation, peut expliquer son emploi, à cette latitude, si on retient la logique spatiale qu’implique

cette dépendance.
En effet, on peut estimer que le transfert de la technique a été d’autant plus rapidement effectué

qu’il a bénéficié des infra-structures de l’Empire perse, de l’organisation administrative du Roi des Rois

ainsi que de la sécurité dont celle-ci était la garante. L’avantage s’accroît quand, de surcroît, on estime

qu’à cet ouvrage d’une capacité et d’une vitesse d’approvisionnement en eau, au moins égales à celles

de son rival local supplanté, le puits artésien 8, ont été associés des moyens de transport plus rapides et

à capacité de charge plus grande. Relevant d’un niveau géographique supérieur que définit l’empire des

Achéménides, la propagation du qanåt aussi loin démontre à quelle maîtrise de la distance était parvenue

l’administration au temps d’Artaxerxès Ier et de Darius II. Cette implantation confirme l’existence

d’une conception de l’espace, capable de fonder à cette si lointaine limite, un territoire dont le paysage

spécifique l’assujettit au système de la Perse.
3 Wuttmann et al., 1998, [et l’étude de M. Chauveau, ce volume, p. 137-142].
4 ‘Ayn Manawir avec son temple et ses maisons agglutinées disposées à proximité de chaque qanåt en est l’exemple

archéologique. Autre preuve de la sédentarisation, certains ouvrages portent un nom, tel le qanåt au

sycomore cité dans un ostracon, cf. tradition qui se poursuit, ainsi : la foggara Zredilla = foggara des sauterelles

: cf. Champault 1969 : 93-196.
5 Voir Brunet 1980 et Grataloup 1996.
6 L’invention a pu avoir lieu sur l’autre rive du golfe persique, en Oman par exemple (voir S. Cleuziou 1997 ; [discussion

après R. Boucharlat, ce volume]), dans toutefois un contexte géomorphologique différent, puisque

l’eau est ou soutirée des nappes phréatiques contenues dans des accumulations détritiques de piémont ou

fournie par un sous-écoulement localisé dans la nappe alluviale d’un oued et non pas extraite du substratum

lui-même, comme à tell Douch.
7 Par des archives datées, trouvées à la hauteur du temple de ‘Ayn Manawir, on sait que les qanåt étaient en service

au temps de Darius II : cf. Wuttmann et al., 1996 [et Chauveau, ce vol.].
8 En effet, 8oom de qanåt inonde chaque parcelle sous une nappe de 10 cm d’épaisseur. A raison d’un débit de

quelques l/s, ce qui équivaut au module d’un puits ordinaire, un hectare est irrigué en un jour. On estime

que la confection d’un qanåt pour 20 fois plus de temps demande cinq à six fois plus de personnes que le

creusement d’un puits (8 semaines en moyenne à trois personnes) et elle peut se compter en mois. Son entretien

peut réclamer dans l’année l’activité de deux personnes employées à temps plein.
-
186 Bernard Bousquet • Qanats

On en conclut que le qanåt et la géographie du site ne se comprennent durant la phase de diffusion

qu’inscrits au niveau supérieur de l’organisation spatiale. Mais au processus de diffusion s’ajoute un effet

de domination, autant d’ordre technique que d’ordre culturel, qui influence le mode de traitement des

données hydrogéologiques locales (tableau 1).
2…à l’oasis
Le groupement des qanåts et leur connexion au puits artésien conduisent à édifier un réseau d’irrigation.

Les arrangements comme les combinaisons y sont multiples et divers, comme le démontrent la fouille

et la cartographie des ouvrages: en amont, les drains actifs peuvent être associés ou juxtaposés en

batterie, afin de mieux rabattre la nappe phréatique contenue dans le volume rocheux. Ils peuvent

également se subdiviser à l’aval et servir de guides à la répartition du débit ainsi augmenté. De même,

un qanåt peut alimenter un puits, comme l’inverse peut également se rencontrer. Il découle de ces

associations ou de ces assistances mutuelles d’ouvrages un effet d’accumulation capable de changer la

nature du niveau géographique supérieur originel. Il en résulte une organisation spatiale nouvelle, par

le paysagement qui accompagne le déploiement du système d’irrigation. Par leur arrangement en réseau,

les installations hydrauliques ont en effet transformé le bas des collines en un piémont irrigué, comme

il s’en trouve au Moyen-Orient méditerranéen. De la sorte, sectoriellement, est amorcée une organisation

de l’espace autre, qui transforme l’environnement restreint du point d’eau, simple halte sur une piste,

en une étendue élaborée, l’oasis. Rome, plus tard, en agrandira encore la superficie, ajoutant aux jardins

ombragés de son coeur une couronne de champs ouverts pour les plantes de lumière (Bousquet 1999).
Par diffusion, l’équipement hydraulique participe ainsi à la configuration d’une aire géohistorique,

à partir des lieux que les Perses fondèrent à la limite de leur empire. Par accumulation, quelques siècles

plus tard, l’assemblage des qanåts en réseau définit un pays d’oasis, reconnu comme tel dès l’Antiquité,

et si bien intégré à la géographie du monde d’alors que cette contrée a été subdivisée elle-même en districts

administratifs, comme en témoigne Kysis, bourgade devenue chef-lieu d’une toparchie. Ce fractionnement

de l’étendue originelle relève de la mobilité des niveaux, au sein de leur hiérarchie non progressive.
-
3Géohistoire du qanat
Le passage d’un niveau à l’autre participe à l’élaboration de géographies successives, c’est à dire à celle

d’une suite de configurations spécifiques auxquelles est chaque fois associé l’arrangement d’un paysage,

en fonction du système technique pratiqué, le puits ou le qanåt. Aussi l’étendue des parcellaires retrouvés

sous les sables permet-elle de préciser l’ampleur de la transformation des oasis liées aux galeries drainantes

(Bousquet-Robin 1999). Les représentations paysagères métaphoriques proposées par les sociétés

du moment en témoignent également. Les textes de l’Antiquité comparent en effet l’oasis tantôt à

une île de désolation, tantôt à un pays de cocagne. L’opposition traduit un changement d’échelle. Elle

atteste la modification de l’ancien espace historique en une région dotée d’une géographie propre, tantôt

réduite à l’insularité insupportable de ses oasis, tantôt perçue comme un archipel fortuné de pays

fertiles. Le qanåt, élément de base du système, présente la particularité de participer à toutes les recompositions

spatiales, quel que soit le niveau considéré.
-
Bernard Bousquet • Qanats
187

Tableau 1: Structure géohistorique
À un premier stade, diffusion et domination du qanåt conduisent à l’identification de lieux géohistoriques.

A un second, accumulation et combinaison en réseau conduisent à une différenciation en

aires géo-historiques. En même temps, il y a changement de niveau à l’intérieur de la gradation

taxonomique d’ordre géographique. Sur le millénaire considéré, on passe de la terre d’Empire d’un espace

historique, au pays des oasis d’une région géographique. Comme la gradation des niveaux n’est pas

progressive, le lieu irrigué par un qanåt qui est le taxon élémentaire de la structure géohistorique, peut

relever de l’un comme de l’autre, sans dépendre d’un échelon de la hiérarchie qui les ordonne. Il est

un invariant dont la signification géohistorique se modifie au cours du temps, en fonction des niveaux

géographiques considérés et de la logique des organisations spatiales qui les définit. Ainsi le qanåt

peut-il être autant d’une terre d’Empire que d’un district de région. Aussi n’est-il pas obligatoirement

lié à un pouvoir centralisé, mais il n’en conserve pas moins une signification géopolitique.
milieu modèle

technique

mode spatiotemporel

modalité

géographique

niveau

géographique

signification

géohistorique

nappes

phéatiques

et sources

artésiennes

= point d’eau

ouvrages

hydrauliques

= qanåt

ou puits

diffusion

= distance

domination

spatiale

supérieur :

empire

lieu d’une terre

d’empire = stade 1

nappes

phéatiques

et piémont

= oasis

connexion

d’ouvrages

= réseau

de qanåts

et de puits

accumulation

= durée

combinaison

technique

médian :

district

aire du pays

des oasis = stade 2
La modélisation montre qu’aux qanåts sont liés un paysage, mais aussi, ce qui justifie l’approche

géohistorique, un processus d’organisation de l’espace, selon des niveaux géographiques qui se sont

différenciés au cours de l’Antiquité9. En les spécifiant de leur côté, céramiques et ostraca confirment l’existence

de ces niveaux géographiques et leur réalité paysagère. On est ainsi conduit à considérer le modèle

technique de l’ouvrage, mais aussi son mode d’installation spatio-temporel, et, peut-être tout autant, les

modalités géographiques de son implantation et de sa récurrence. On en tire les conclusions suivantes.
Modèle technique La structure et l’utilisation de ces galeries sont en effet similaires à celles qui

caractérisent les mêmes ouvrages autour de la cuvette iranienne. L’une et l’autre les font ainsi dépendre

d’un espace historique.
Mode spatio-temporel Pour chacun des sites de la région de tell Douch, la multiplication de ces

installations hydrauliques aboutit à la constitution de réseaux. Ces derniers s’imposent comme autant

de dispositifs propagateurs d’oasis et fondements d’un pays 10 .
9 Voir Bousquet 1996 : 285, fig. 50. Également Bousquet 1995/96.
10 Une oasis résulte, en effet, du groupement d’une vingtaine à une trentaine d’ouvrages, pour une superficie draînée

de 3 à 4 km2, puisque les segments en tunnel, longs de 800 m en moyenne, sont disposés assez régulièrement

tous les 200 m.
-
188 Bernard Bousquet • Qanats

Modalité géographique La logique de la diffusion/domination de l’équipement dans un lieu autant

que celle de son accumulation/combinaison ultérieure sur place conduisent à définir le niveau géographique

dans lequel s’inscrit leur action. Pour les sites archéologiques de la région, par l’effet de ces processus

est posée la question de la signification et de la dynamique événementielles et géohistoriques du qanåt, autant

que de celle de son assemblage en réseau.
Aussi peut-on admettre que seule la multiplication des lieux géographiques définis par le qanåt possède

un pouvoir d’action de nature géohistorique pour le milieu et l’espace des sociétés. En outre, comme

le rapport diffusion/accumulation a été récurrent, mais à des niveaux différents, des périodes géohistoriques

ont été de la sorte introduites dans la durée retenue. Ces stades ont pour effet de scander la transformation

spatio-temporelle des lieux, en particulier en y instaurant le risque d’un tarissement accéléré des nappes,

car le qanåt se présente d’une période à l’autre comme un invariant, puisqu’il conserve sa structure

technique, bien que passant d’un niveau à l’autre.
L’approche géohistorique interprète la mobilité des niveaux géographiques comme le résultat de

processus capables, au cours du temps, d’imposer des configurations spatiales particulières à l’action

des sociétés. Les qanåts en Égypte le suggèrent. Ils furent d’abord moyens à l’appui d’une terre d’Empire,

puis équipements au bénéfice des oasis. Ce changement entraîne pour l’économie de l’eau pratiquée

des conceptions d’ordre géopolitique différentes. L’une est caractéristique d’une terre à la limite d’une

conjonction d’espaces associés au sein d’un pouvoir impérial. Le qanåt sert à son établissement. L’autre

participe à un domaine défini par la continuité des relations économiques et la complémentarité des

échanges. La multiplication des qanåts aide au développement local 11 et à sa division en pays. L’histoire

de cette portion de désert possède donc une géographie que la modélisation géohistorique fondée sur

le qanåt aide à définir et à suivre dans son évolution.
11 Voir Reddé 1999.
-
Bernard Bousquet • Qanats
189

Bibliographie citée
Bousquet B., 1995/1996 « Permanence et précarité : espace du danger et contraintes éco-géographiques

d’ordre technique. Exemple de Tell Douch (Égypte) », Cahiers nantais 44-45, : 215-252.

Bousquet B., 1996, Tell Douch et sa région. Géographie d’une limite de milieu à une frontière d’Empire,
Dfifao 31, 368 p.
BousquetB., 1999, «Les paysages d’irrigation dans les oasis du désert libyque (Égypte), pendant l’Antiquité»,

dans: L’Afrique du Nord antique. Cultures et paysages, Presses universitaires Franc-Comtoises:

47-66.
Bousquet B. & Robin M., 1999, « Les oasis de Kysis Essai de définition géoarchéologique »,
Bifao 99 : 21-40.

Brunet R., 1980, «La combinaison des modèles dans l’analyse spatiale», L’Espace géographique 4: 253-265.

Champault D., 1969, Une oasis du Sahara nord-occidental Tabelbala, Paris, CNRS, 486 p.

Cleuziou S., 1997, «Construire et protéger son terroir: les oasis d’Oman à l’âge du bronze» dans: Bravard
J-P. et al. (édit), La dynamique des paysages protohistoriques, antiques, médiévaux et modernes,

ADPCA, Antibes, 1997 : 389-412.

Fouache E., 1999, L’alluvionnement historique en Grèce occidentale et au Péloponnèse. Géomorphologie
Archéologie Histoire, (BCH, supplément 35, 235 p.), Athènes-Paris.

Grataloup Ch., 1996, Lieux d’Histoire, Essai de géohistoire systématique, Reclus, Montpellier, 200 p.

Planhol X de & Rognon P., 1970, Les zones tropicales arides et subtropicales, Paris, A. Colin, 487p.

Reddé M., 1999, « Un village dans les oasis d’Égypte : Douch », dans : L’Afrique du Nord antique.
Cultures et paysages, Presses universitaires Franc-Comtoises : 67-84.

Wuttmann M. et al., 1996, « Premier rapport préliminaire », Bifao 96, : 385-451.

Wuttmann M. et al., 1998, «‘Ayn Manawir (oasis de Kharga) Deuxième rapport préliminaire »,
Bifao 98 : 367-462.
-
190 Bernard Bousquet • Qanats

Achevé d’imprimer sur les presses de l’imprimerie Autographe,

10 bis rue Bisson, 75020 Paris, téléphone 01 43 58 26 26,

octobre 2001

La collecte et la distribution des eaux ont été au coeur des préoccupations des royaumes

et des communautés du Moyen-Orient ancien, y compris à l’époque de l’empire achéménide. On connaît

aussi alors une forme spécifique d’accès aux eaux souterraines, les qanåts, canaux sub-horizontaux forés

parfois très profondément et sur de longues distances. L’historien hellénistique Polybe en a laissé la seule

description littéraire antique, et il attribue aux Grands rois une politique fiscale incitative en la matière.

La terminologie qu’il utilise conduit à inclure dans le dossier une inscription grecque d’Érétrie, et, plus

généralement, ce que l’on sait des canalisations souterraines en Grèce. Par ailleurs, la discussion déjà

ancienne sur l’origine et la diffusion de la technique des qanâts se nourrit maintenant des découvertes réalisées

récemment par une mission archéologique française dans l’oasis égyptienne de Khargeh. C’est afin de faire

le point sur toutes ces questions que Pierre Briant a réuni au Collège de France, le 25 mars 2000, un séminaire

international, où des chercheurs venant de spécialités différentes ont confronté leurs points de vue

selon une approche réellement inter-disciplinaire: historiens de la Grèce ancienne et de l’empire achéménide,

spécialistes des textes épigraphiques grecs et démotiques, archéologues et géo-archéologues travaillant sur

divers chantiers du Proche-Orient, de l’Asie centrale à l’Égypte, ont confronté leurs points de vue et mis

en commun leurs réflexions. Ainsi construit autour d’interrogations communes et à partir de modes de

lecture spécifiques, l’ensemble des interventions représente un tout cohérent, où se croisent et se fécondent

histoire des techniques, histoire sociale, histoire économique et histoire de l’État.
Avec des contributions de Pierre Briant, professeur au Collège de France, Paris ; Denis

Knoepfler, professeur à l’université de Neuchâtel ; Thierry Chatelain, doctorant aux universités de

Neuchâtel et de Paris-IV ; Michel Wuttmann, membre de l’institut français d’Archéologie orientale

(Ifao), Le Caire ; Michel Chauveau, école pratique des Hautes études, Paris ; Mirjo Salvini, Istituto

per gli Studi Micenei ed Egeo-anatolici (Ismea), Rome ; Rémy Boucharlat, CNRS, maison de l’Orient,

Lyon ; Bernard Bousquet, institut de Géographie, université de Nantes.
27 euros 177 francs
persika 2

-:HSMJLE=ZXVUV[:

éditions ISBN 2-914531-01-X
1   ...   31   32   33   34   35   36   37   38   39

similaire:

Bibliographie citée (p. 77-79) iconAncienne «parrochia St Stephani de Saorra», citée en 1163, dans un...
«parrochia St Stephani de Saorra», citée en 1163, dans un précepte du pape Alexandre III, parmi les possessions de l’abbaye du Canigou,...

Bibliographie citée (p. 77-79) iconProgramme 16 jours / 13 nuits
«City of Sails» (la citée des voiles), on ne peut manquer les centaines de voiliers glissant au grès du vent dans la magnifique baie...

Bibliographie citée (p. 77-79) iconBibliographie Ce document, la bibliographie détaillée et les données...

Bibliographie citée (p. 77-79) iconPlaine Commune Promotion Réseau d’entreprises éco-industrielles Compte rendu
«Écologie industrielle sur la zae jean Mermoz» est citée puisqu’elle a été réalisée par un cabinet extérieur au territoire

Bibliographie citée (p. 77-79) iconBibliographie Bibliographie relative à la ville de Casablanca
«Variations spatiales du privé et du public à travers les exemples de Ben M'sik et de Hay Moulay Rachid à Casablanca»

Bibliographie citée (p. 77-79) iconBibliographie

Bibliographie citée (p. 77-79) iconBibliographie

Bibliographie citée (p. 77-79) iconBibliographie

Bibliographie citée (p. 77-79) iconBibliographie. 69

Bibliographie citée (p. 77-79) iconBibliographie








Tous droits réservés. Copyright © 2016
contacts
ar.21-bal.com