De la même auteure, à la Bibliothèque








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L’immortelle


J’eus à peine donné cette espérance de succès, que je m’effrayai de l’avoir eue moi-même. Mais il n’y avait plus moyen de reculer. Ma belle cliente me pressait de questions.

– Eh bien, madame, lui dis-je, il faut trouver le moyen de faire parler l’oracle, sans jouer le rôle d’imposteur ; mais il faut que vous me donniez, sur l’apparition dont ce château passe pour être le théâtre, des détails qui me manquent.

– Voulez-vous voir les vieilles paperasses d’où j’ai tiré mon extrait ? s’écria-t-elle avec joie. Je les ai ici.

Elle ouvrit un meuble dont elle avait la clef et me montra une assez longue notice, avec commentaires écrits à diverses époques par divers chroniqueurs attachés à la chapelle du château ou au chapitre d’un couvent voisin qui avait été sécularisé sous le dernier règne.

Comme je n’étais pas pressé de prendre un engagement qui eût abrégé le temps accordé à ma mission, je remis la lecture de ce fantastique dossier à la veillée, et je me laissai chastement cajoler par mon enchanteresse. Je m’imaginai qu’elle y mettait une délicate coquetterie, soit qu’elle tînt à ses idées au point de se compromettre un peu pour les faire triompher, soit que ma résistance excitât son légitime orgueil de femme irrésistible, soit enfin, et je m’arrêtais avec délices à cette dernière supposition, qu’elle sentît pour moi une estime particulière.

Elle fut forcée de me quitter : d’autres visites arrivaient. Il y eut du monde à dîner ; elle me présenta à ses nobles voisins avec une distinction marquée, et me témoigna devant eux plus d’égards que je n’avais peut-être droit d’en attendre. Quelques-uns parurent trouver que c’était trop pour un petit robin de ma sorte, et tentèrent de le lui faire entendre. Elle prouva qu’elle ne craignait guère la critique, et montra tant de vaillance à me soutenir, que j’en devins un peu fou.

Lorsque nous fûmes seuls ensemble, madame d’Ionis me demanda ce que je comptais faire des manuscrits relatifs à l’apparition des trois dames vertes. J’avais la tête montée, il me semblait que j’étais aimé et que je ne devais plus redouter de railleries. Je lui racontai donc ingénument la vision que j’avais eue, et celle, toute semblable, que m’avait racontée l’abbé de Lamyre.

– Me voilà donc forcé de croire, ajoutai-je, qu’il est certaines situations de l’âme où, sans frayeur comme sans charlatanisme et sans superstition, certaines idées se revêtent d’images qui trompent nos sens, et je veux étudier ce phénomène, déjà subi par moi, dans les relations sages ou folles de ceux chez lesquels il a pu se produire. Je ne vous cache pas que, contrairement à mes habitudes d’esprit, loin de me défendre du charme des illusions, je ferai tout mon possible pour leur abandonner mon cerveau. Et si, dans cette disposition d’esprit toute poétique, je réussis à voir et à entendre quelque fantôme qui me commande de vous obéir, je ne reculerai pas devant le serment que pourront exiger ensuite M. d’Ionis et sa mère. Je ne serai pas forcé de jurer que je crois aux révélations des esprits et aux apparitions des morts, car je n’y croirai peut-être pas pour cela ; mais, en affirmant que j’ai entendu des voix, puisque aujourd’hui même je puis affirmer que j’ai vu des ombres, je ne serai pas un menteur ; et peu m’importe de passer pour un insensé, si vous me faites l’honneur de ne pas partager cette opinion.

Madame d’Ionis montra un grand étonnement de ce que je lui disais, et me fit beaucoup de questions sur ma vision dans la chambre aux dames. Elle m’écouta sans rire, et même elle s’étonna du calme avec lequel j’avais subi cette étrange aventure.

– Je vois, me dit-elle, que vous êtes un esprit très courageux. Quant à moi, à votre place, j’aurais eu peur, je le confesse. Avant que je vous permette de recommencer cette épreuve, jurez-moi que vous n’en serez ni plus effrayé ni plus affecté que la première fois.

– Je crois pouvoir vous le promettre, lui répondis-je. Je me sens excessivement calme, et, dussé-je voir quelque spectacle effrayant, j’espère rester assez maître de moi-même pour ne l’attribuer qu’à ma propre imagination.

– Est-ce donc cette nuit que vous voulez faire cette évocation singulière ?

– Peut-être ; mais je veux d’abord lire tout ce qui y a rapport. Je voudrais aussi parcourir quelque ouvrage sur ces matières, non un ouvrage de critique dénigrante, je suis bien assez porté au doute, mais un de ces vieux traités naïfs, où, parmi beaucoup d’enfantillages, il peut se trouver des idées ingénieuses.

– Eh bien, vous avez raison, dit-elle, mais je ne sais quel ouvrage vous conseiller : je n’ai guère fouillé dans ces vieux livres. Si vous voulez, demain, chercher dans la bibliothèque...

– Si vous le permettez, je ferai cette étude tout de suite. Il n’est que onze heures, c’est le moment où votre maison devient calme et silencieuse. Je veillerai dans la bibliothèque, et, si je puis venir à bout de m’exalter un peu, je serai d’autant mieux disposé à retourner dans ma chambre pour offrir aux trois dames le souper commémoratif qui a la vertu de les attirer.

– J’y ferai donc porter le fameux plateau, dit madame d’Ionis en souriant, et j’ai besoin de m’efforcer de trouver cela fort singulier pour n’en être pas un peu émue.

– Quoi ! madame, vous aussi... ?

– Eh ! mon Dieu, reprit-elle, que sait-on ? On rit de tout, aujourd’hui ; en est-on plus sage qu’autrefois ? Nous sommes des créatures faibles qui nous croyons fortes : qui sait si ce n’est point à cause de cela que nous nous rendons plus matériels que Dieu ne le voudrait, et si ce que nous prenons pour de la lucidité n’est pas un aveuglement ? Comme moi, vous croyez à l’immortalité des âmes. Une séparation absolue entre les nôtres et celles qui sont dégagées de la matière est-elle chose si claire à concevoir que nous puissions la prouver ?

Elle me parla dans ce sens pendant quelques instants, avec beaucoup d’esprit et d’imagination ; puis elle me quitta un peu troublée, en me suppliant, pour peu que j’eusse quelque trouble moi-même et que je vinsse à être assiégé d’idées noires, de ne pas donner suite à mon projet. J’étais si heureux et si touché de sa sollicitude, que je lui exprimai mon regret de n’avoir pas un peu de peur à braver pour lui marquer mon zèle.

Je remontai à ma chambre, où Zéphyrine avait déjà disposé la corbeille ; Baptiste voulait m’en débarrasser.

– Laisse cela, lui dis-je, puisque c’est l’habitude de la maison, et va te coucher. Je n’ai pas plus besoin de toi que les autres jours.

– Mon Dieu ! monsieur, me dit-il, si vous le permettiez, je passerais la nuit sur un fauteuil dans votre chambre.

– Et pourquoi cela, mon ami ?

– Parce qu’on dit qu’il y revient. Oui, oui, monsieur, j’ai fini par comprendre les domestiques. Ils ont grand’peur, et moi qui suis un vieux soldat, je serais content de leur prouver que je ne suis pas si sot qu’eux.

Je refusai et le laissai arranger ma couverture, pendant que je descendais à la bibliothèque, après lui avoir dit de ne pas m’attendre.

Je parcourus cette immense salle avant de me mettre au travail, et je m’y enfermai avec soin, dans la crainte d’y être troublé par quelque valet curieux ou moqueur. Puis j’allumai un chandelier d’argent à plusieurs branches et commençai à dépouiller le fantastique dossier relatif aux dames vertes.

Les apparitions fréquentes, observées et rapportées avec détail, des trois demoiselles d’Ionis, coïncidaient de tout point avec ce que j’avais vu et avec ce que l’abbé m’avait raconté. Mais ni lui ni moi n’avions poussé la foi ou le courage jusqu’à interroger les fantômes. D’autres l’avaient fait, disaient les chroniqueurs, et il leur avait été donné de voir les trois vierges, non plus sous l’apparence de nuages verdâtres, mais dans tout l’éclat de leur jeunesse et de leur beauté ; non pas toutes à la fois, mais une en particulier, pendant que les deux autres se tenaient à l’écart. Alors cette funèbre beauté répondait à toutes les questions sérieuses et décentes que l’on voulait lui adresser. Elle dévoilait les secrets du passé, du présent et de l’avenir. Elle donnait de judicieux conseils. Elle enseignait les trésors cachés à ceux qui étaient capables d’en bien user en vue du salut. Elle disait les malheurs à éviter, les fautes à réparer ; elle parlait au nom du ciel et des anges ; enfin, c’était une puissance bienfaisante pour ceux qui la consultaient avec de bons et pieux desseins. Elle n’était grondeuse et menaçante qu’avec les railleurs, les libertins et les impies. Le manuscrit disait : « D’une intention méchante et fallacieuse, on leur a vu faire de grandes punitions, et ceux qui ne s’y porteront que par malice et vaine curiosité peuvent s’attendre à des choses épouvantables, qu’ils seront bien marris d’avoir cherchées. »

Sans s’expliquer sur ces choses épouvantables, le manuscrit donnait la formule de l’évocation et tous les rites à observer, avec un si grand sérieux et une si naïve bonne foi, que je m’y laissai aller. L’apparition prenait dans mon imagination des couleurs merveilleuses qui me séduisaient et me faisaient réellement désirer, plutôt que craindre, d’être gagné par la persuasion. Je ne me sentais nullement attristé et glacé par l’idée de voir marcher et d’entendre parler des morts. Tout au contraire, je m’exaltais dans des rêves élyséens, et je voyais une Béatrix se lever dans les rayons de mon empyrée.

– Et pourquoi n’aurais-je pas ces rêves, m’écriai-je intérieurement, puisque j’ai eu le prologue de la vision ? Ma sotte terreur m’a rendu indigne et incapable d’être initié plus avant aux révélations swedenborgistes, auxquelles croient d’excellents esprits, et dont j’ai eu le tort de me moquer. Je dépouillerai le vieil homme avec plaisir, car ceci est plus riant et plus sain pour l’âme d’un poète que la froide négation de notre siècle. Si je passe pour fou, si je le deviens, qu’importe ! J’aurai vécu dans une sphère idéale, et je serai peut-être plus heureux que tous les sages de la terre.

Je me parlais ainsi à moi-même, la tête dans mes mains. Il était environ deux heures du matin, et le plus profond silence régnait dans le château et dans la campagne, lorsqu’une musique douce et charmante, qui semblait partir de la rotonde, m’arracha à ma rêverie. Je levai la tête et reculai le flambeau placé devant moi, pour voir de qui me venait cette gracieuseté musicale. Mais les quatre bougies qui éclairaient pleinement ma table de travail ne suffisaient pas à me faire distinguer même le fond de la salle, à plus forte raison, la rotonde placée au delà.

Je me dirigeai aussitôt vers cette rotonde, et, n’étant plus offusqué d’une autre lumière, je distinguai les parties supérieures du beau groupe de la fontaine, éclairées en plein par la lune, qui donnait dans une des fenêtres en voussure de la coupole. Le reste de la salle circulaire était dans l’ombre. Pour m’assurer que j’étais seul, comme il me semblait l’être, j’ouvris le volet de la grande porte vitrée qui donnait sur le parterre, et je vis qu’en effet il n’y avait personne. La musique avait semblé diminuer et se perdre à mesure que j’approchais, et je ne l’entendais presque plus. Je passai dans l’autre galerie, que je trouvai également déserte, mais où les sons qui m’avaient charmé se firent de nouveau entendre très distincts, comme s’ils partaient, cette fois, de derrière moi.

Je m’arrêtai sans me retourner, pour les écouter. Ils étaient doux et plaintifs et ne formaient aucune combinaison mélodique que je fusse en état de comprendre. C’était plutôt une suite d’accords vagues très mystérieux, formés comme au hasard, et par des instruments qu’il m’eût été impossible de nommer, car leur timbre ne ressemblait à rien qui me fût connu. L’ensemble en était agréable, quoique très mélancolique.

Je revins sur mes pas et m’assurai que ces voix, si on pouvait les appeler ainsi, partaient bien réellement de la conque des tritons et des sirènes de la fontaine, augmentant et diminuant d’intensité selon que l’eau, qui était devenue irrégulière et intermittente, se pressait ou se ralentissait dans les vasques.

Je ne vis rien là de fantastique, car je me rappelai avoir entendu parler de ces girandes italiennes qui produisaient, au moyen de l’air comprimé par l’eau, des orgues hydrauliques plus ou moins réussies. Celles-ci étaient fort douces et très justes, peut-être parce qu’elles ne jouaient aucun air et ne faisaient que soupirer des accords harmoniques, comme font les harpes éoliennes.

Je me souvins aussi que madame d’Ionis m’avait parlé de cette musique en me disant qu’elle était dérangée, et que parfois elle se mettait à aller toute seule pendant quelques instants.

Cette explication ne m’empêcha pas de poursuivre le cours de mes songeries poétiques. J’étais reconnaissant envers la capricieuse fontaine qui voulait bien chanter pour moi seul, par une si belle nuit et au milieu d’un si religieux silence.

Vue ainsi au clair de la lune, elle était d’un effet prestigieux. Elle semblait verser, dans les frais roseaux placés sur ses bords, une pluie de diamants verts. Les tritons, immobiles dans leurs mouvements tumultueux, avaient quelque chose d’effrayant, et leurs plaintes mourantes, mêlées au petit bruit des cascatelles, les faisaient paraître comme désespérées d’avoir leurs esprits violents enchaînés dans des corps de marbre. On eût dit d’une scène de la vie païenne pétrifiée tout à coup sous le geste souverain de la néréide.

Je me rendis compte alors de l’espèce d’effroi que cette nymphe m’avait causé en plein jour, avec son calme superbe au milieu de ces monstres tordus sous ses pieds.

– Une âme impassible peut-elle exprimer la vraie beauté ? pensai-je ; et, si cette créature de marbre venait à s’animer, toute magnifique qu’elle est, ne ferait-elle pas peur, par cet air de suprême indifférence qui la rend trop supérieure aux êtres de notre race ?

Je la regardai attentivement dans le reflet de la lune qui baignait ses blanches épaules et détachait sa petite tête posée sur un cou élancé et puissant comme un fût de colonne. Je ne pouvais distinguer ses traits, car elle était placée sur une certaine hauteur ; mais son attitude dégagée se dessinait en lignes brillantes d’une grâce incomparable.

– C’est véritablement là, pensai-je, l’idée que j’aimerais à me faire de la dame verte, car il est certain que, vue ainsi...

Tout à coup, je cessai de raisonner et de penser. Il me semblait voir remuer la statue.

Je crus qu’un nuage passait sur la lune et produisait cette illusion ; mais ce n’en était pas une. Seulement, ce n’était pas la statue qui remuait, c’était une forme qui se levait de derrière elle, ou d’à côté d’elle, et qui me paraissait toute semblable, comme si un reflet animé se fût détaché de ce corps de marbre et l’eût quitté pour venir à moi.

Je doutai un instant du témoignage de mes yeux, mais cela devint si distinct, si évident, que je fus persuadé bientôt de voir un être réel, et que je n’éprouvai aucun sentiment de terreur, ni même de très grande surprise.

L’image vivante de la néréide descendait, comme en voltigeant, les plans inégaux du monument. Ses mouvements avaient une aisance et une grâce idéales. Elle n’était pas beaucoup plus grande qu’une femme réelle, bien que l’élégance de ses proportions lui conservât ce cachet de beauté exceptionnelle qui m’avait effrayé dans la statue ; mais je n’éprouvais plus rien de semblable, et mon admiration tenait de l’extase. Je lui tendais les bras pour la saisir, car il me semblait qu’elle allait s’élancer jusqu’à moi en franchissant un escarpement de cinq à six pieds qui nous séparait encore.

Je me trompais. Elle s’arrêta sur le bord de la rocaille et me fit signe de m’éloigner.

J’obéis machinalement et je la vis s’asseoir sur un dauphin de marbre, qui se mit à pousser de véritables rugissements. Aussitôt toutes ces voix hydrauliques grossirent comme une tempête et formèrent un concert vraiment diabolique autour d’elle.

Je commençais à en avoir les nerfs agacés, lorsqu’une lumière glauque, qui ne semblait être qu’un clair de lune plus brillant, jaillit je ne sais d’où, et me montra nettement les traits de la néréide vivante, si semblables à ceux de la statue, que j’eus besoin de regarder encore celle-ci pour m’assurer qu’elle n’avait pas quitté son siège de pierre.

Alors, sans plus songer à rien expliquer, sans désirer de rien comprendre, je m’enivrai, dans une muette stupeur, de la beauté surnaturelle de l’apparition. L’effet qu’elle produisit sur moi fut si absolu, que je n’eus pas même la pensée de m’approcher pour m’assurer de son immatérialité, comme j’avais fait lorsqu’elle s’était produite dans ma chambre.

Si j’y songeai, ce dont je ne saurais me rendre compte, la crainte de la faire évanouir par une curiosité audacieuse me retint probablement.

Comment n’aurais-je pas été maîtrisé par le désir d’en rassasier mes yeux ? C’était la néréide sublime, mais avec des yeux vivants, des yeux clairs, d’une douceur fascinatrice, et des bras nus, aux contours de chair transparente et aux mouvements mœlleux comme ceux de l’enfance. Cette fille du ciel semblait avoir quinze ans tout au plus. Elle exprimait la forte chasteté de l’adolescence par l’ensemble de sa forme, tandis que son visage s’éclairait des séductions de la femme arrivée au développement de l’âme.

Sa parure étrange était exactement celle de la néréide : une robe ou tunique flottante, faite de je ne sais quel tissu merveilleux dont les plis mœlleux semblaient avoir été mouillés ; un diadème ciselé avec un soin exquis, et des flots de perles s’enroulant aux tresses d’une chevelure splendide, avec ce mélange de luxe singulier et de caprice heureux qui caractérise le goût de la renaissance ; un contraste charmant et bizarre entre le vêtement tout simple, qui ne puisait sa richesse que dans l’aisance de son arrangement et le fini minutieux des bijoux et des mignardises de la coiffure.

Je l’aurais regardée toute ma vie sans m’aviser de lui parler. Je ne m’apercevais pas du silence qui avait succédé au vacarme de la fontaine. Je ne sais même pas si je la contemplai un instant ou une heure. Il me sembla tout d’un coup que je l’avais toujours vue, toujours connue : c’est peut-être que je vivais un siècle par seconde.

Elle me parla la première. J’entendis et ne compris pas tout de suite, car le timbre d’argent de sa voix était surnaturel comme sa beauté et en complétait le prestige.

Je l’écoutais comme une musique, sans chercher à ses paroles un sens déterminé.

Enfin, je fis un effort pour secouer cette ivresse, et j’entendis qu’elle me demandait si je la voyais. Je ne sais pas ce que je lui répondis, car elle ajouta :

– Sous quelle apparence me vois-tu ?

Et je remarquai seulement alors qu’elle me tutoyait.

Je me sentis entraîné à lui répondre de même ; car, si elle me parlait en reine, je lui parlais, moi, comme à la Divinité.

– Je te vois, lui dis-je, comme un être auquel rien ne peut être comparé sur la terre.

Il me sembla qu’elle rougissait ; car mes yeux s’étaient habitués à la lueur vert-de-mer dont elle semblait baignée. Je la voyais blanche comme un lis, avec les fraîches couleurs de la jeunesse sur les joues. Elle eut un sourire mélancolique qui l’embellit encore.

– Que vois-tu en moi d’extraordinaire ? me dit-elle.

– La beauté, répondis-je brièvement.

J’étais trop ému pour en dire davantage.

– Ma beauté, reprit-elle, c’est en toi qu’elle se produit ; car elle n’existe pas par elle-même sous une forme que tu puisses apprécier. Il n’y a ici de moi que ma pensée. Parle-moi donc comme à une âme et non comme à une femme. Quel conseil avais-tu à me demander ?

– Je ne m’en souviens plus.

– D’où vient cet oubli ?

– De ta présence.

– Essaye de te rappeler.

– Non, je ne veux pas !

– Alors, adieu !

– Non ! non ! m’écriai-je en m’approchant d’elle comme pour la retenir, mais en m’arrêtant avec terreur, car la lueur pâlit subitement et l’apparition sembla s’effacer. Au nom du ciel, restez ! repris-je avec angoisse. Je suis soumis, je suis chaste dans mon amour.

– Quel amour ! demanda-t-elle en redevenant brillante.

– Quel amour ? Je ne sais pas, moi ! Ai-je parlé d’amour ? Eh bien, oui, je me souviens ! J’aimais hier une femme, et je voulais lui plaire, faire sa volonté au risque de trahir mon devoir. Si vous êtes une pure essence, comme je le crois, vous savez toutes choses. Dois-je donc vous expliquer... ?

– Non, je sais les faits qui intéressent la postérité de la famille dont j’ai porté le nom. Mais je ne suis pas la Divinité, je ne lis pas dans les âmes. Je ne savais pas que tu aimais...

– Je n’aime personne ! À l’heure qu’il est, je n’aime rien sur la terre, et je veux mourir si, dans une autre région de la vie, je peux vous suivre !

– Tu parles dans le délire. Pour être heureux dans la mort, il faut avoir été pur dans la vie. Tu as un devoir difficile à remplir, et c’est pourquoi tu m’as appelée. Fais donc ton devoir ou tu ne me reverras plus.

– Quel est-il, ce devoir ? Parlez ; je ne veux plus obéir qu’à vous seule.

– Ce devoir, répondit la néréide en se penchant vers moi et en me parlant si bas, que j’avais peine à distinguer sa voix du frais murmure de l’eau, c’est d’obéir à ton père. Et puis tu diras à la femme généreuse qui veut se sacrifier que ceux qu’elle plaint la béniront toujours, mais ne veulent point accepter son sacrifice. Je connais leurs pensées, car ils m’ont appelée et consultée. Je sais qu’ils luttent pour leur honneur, mais qu’ils ne sont pas effrayés de ce que les hommes appellent la pauvreté. Il n’y a pas de pauvreté pour les âmes fières. Dis cela à celle qui t’interrogera demain, et ne cède pas à l’amour qu’elle t’inspire jusqu’à trahir ta religion de famille.

– J’obéirai, je le jure ! Et, à présent, révélez-moi les secrets de la vie éternelle. Où est votre âme maintenant ? quelles facultés nouvelles a-t-elle acquises dans ce renouvellement ?...

– Je ne puis te répondre que ceci : la mort n’existe pas ; rien ne meurt ; mais les choses de l’autre vie sont bien différentes de ce que l’on s’imagine dans le monde où tu es. Je ne t’en dirai pas davantage, ne m’interroge pas.

– Dites-moi, au moins, si je vous reverrai dans cette autre vie ?

– Je l’ignore.

– Et dans celle-ci ?

– Oui, si tu le mérites.

– Je le mériterai ! Dites-moi encore... Puisque vous pouvez diriger et conseiller ceux qui vivent dans ce monde, ne pouvez-vous pas les plaindre ?

– Je le peux.

– Et les aimer ?

– Je les aime tous comme des frères avec qui j’ai vécu.

– Aimez-en un plus que les autres. Il fera des miracles de courage et de vertu pour que vous vous intéressiez à lui.

– Qu’il fasse ces miracles, et il me retrouvera dans ses pensées. Adieu !

– Attendez, oh ! mon Dieu, attendez ! On croit que vous donnez comme gage de votre protection, et comme moyen de vous évoquer de nouveau, une bague magique à ceux qui ne vous ont pas offensée. Est-ce vrai ? et me la donnerez-vous ?

– Des esprits grossiers peuvent seuls croire à la magie. Tu ne saurais y croire, toi qui parles de la vie éternelle et qui cherches la vérité divine. Par quel moyen une âme, qui se communique à toi sans le secours d’organes réels, pourrait-elle te donner un objet matériel et palpable ?

– Pourtant, je vois à votre doigt une bague étincelante.

– Je ne puis voir ce que tes yeux voient. Quelle bague crois-tu voir ?

– Un large anneau avec une émeraude en forme d’étoile enchâssée dans l’or.

– Il est étrange que tu voies cela, dit-elle, après un moment de silence ; les opérations involontaires de la pensée humaine, et la connexion de ses rêves avec certains faits évanouis, renferment peut-être des mystères providentiels. La science de ces choses inexplicables n’appartient qu’à celui qui sait la cause et la raison de tout. La main que tu crois voir n’existe que dans ton cerveau. Ce qui reste de moi dans la tombe te ferait horreur ; mais peut-être me vois-tu telle que j’ai été sur la terre. Dis-moi comment tu me vois.

Je ne sais quelle description enthousiaste je lui fis d’elle-même. Elle parut écouter avec attention et me dit :

– Si je ressemble à la statue qui est ici, tu ne dois pas t’en étonner, car je lui ai servi de modèle. Tu réveilles par là, en moi, le souvenir effacé de ce que j’ai été, et jusqu’aux pierreries que tu décris, je me souviens de m’en être parée. La bague que tu crois voir, je l’ai perdue dans une chambre de ce château que j’habitais ; elle tomba entre deux pierres disjointes sous l’âtre de la cheminée. Je devais faire lever la pierre le lendemain ; mais, le lendemain, j’étais morte. Peut-être la retrouveras-tu si tu la cherches. En ce cas, je te la donne en souvenir de moi et du serment que tu m’as fait de m’obéir. Voici le jour, adieu !

Cet adieu me causa la plus atroce douleur que j’eusse jamais ressentie ; je perdis la tête et faillis m’élancer encore pour retenir l’ombre enchanteresse ; car peu à peu je m’étais assez rapproché d’elle pour être à portée de saisir le bord de son vêtement si j’eusse osé le toucher, mais je n’osai pas. J’avais oublié, il est vrai, les menaces de la légende contre ceux qui tentaient de commettre cette profanation ; j’étais seulement retenu, et comme anéanti, par un respect superstitieux ; mais un cri de désespoir sorti de ma poitrine alla vibrer jusque dons les conques marines des tritons de la fontaine.

L’ombre s’arrêta, comme retenue par la pitié.

– Que veux-tu encore ? me dit-elle. Voici le jour, je ne puis rester.

– Pourquoi donc ? Si tu le voulais !

– Je ne dois pas revoir le soleil de cette terre. J’habite l’éternelle lumière d’un monde plus beau.

– Emmène-moi dans ce monde ! Je ne veux plus rester dans celui-ci ; je n’y resterai pas, je le jure, si je ne dois plus te revoir.

– Tu me reverras, sois tranquille, dit-elle. Attends l’heure où tu en seras digne, et, jusque-là, ne m’évoque plus. Je te le défends. Je veillerai sur toi comme une providence invisible, et, le jour où ton âme sera aussi pure qu’un rayon du matin, je t’apparaîtrai par la seule évocation de ton pieux désir. Soumets-toi !

– Soumets-toi ! répéta une voix grave qui résonna à ma droite.

Je me retournai et vis un des fantômes que j’avais déjà vus dans ma chambre, lors de la première apparition.

– Soumets-toi ! répéta comme un écho une voix toute pareille, à ma gauche.

Et je vis le second fantôme.

Je n’en fus pas ému, bien que ces deux spectres eussent, dans la hauteur de leur taille et dans le timbre profond de leur voix, quelque chose de lugubre. Mais que m’importait, à moi, de voir ou d’entendre des choses horribles ? Rien ne pouvait m’arracher au ravissement où j’étais plongé. Je ne m’arrêtai même pas à regarder ces ombres accessoires ; je cherchais des yeux ma céleste beauté. Hélas ! elle avait disparu, et je ne voyais plus que l’immobile néréide de la fontaine, avec sa pose impassible et les tons froids du marbre, bleui par les reflets du matin.

Je ne sais ce que devinrent ses sœurs ; je ne les vis pas sortir. Je tournais autour de la fontaine comme un insensé. Je croyais être endormi et je m’étourdissais dans la confusion de mes idées, avec l’espoir de ne pas m’éveiller.

Mais je me rappelai la bague promise, et montai à ma chambre, où je trouvai Baptiste, qui me parla, sans que je vinsse à bout de savoir de quoi. Il me sembla troublé, peut-être à cause de l’expression de ma figure, mais je ne pensai pas à l’interroger. Je cherchai dans l’âtre et j’y remarquai bientôt deux pierres mal jointes. Je m’efforçai de les soulever. C’était une entreprise impossible sans les outils nécessaires.

Baptiste me croyait probablement fou, et, cherchant machinalement à m’aider :

– Est-ce que monsieur a perdu quelque chose ? dit-il.

– Oui, j’ai laissé tomber là, hier, une de mes bagues.

– Une bague ?... Monsieur ne porte pas de bagues ! Je ne lui en ai pas vu.

– C’est égal. Tâchons de la trouver.

Il prit un couteau, gratta la pierre tendre pour élargir la fente, enleva la cendre et le ciment en poudre qui la remplissait, et, tout en travaillant à me satisfaire, il me demanda comment était faite cette bague, de l’air dont il m’eût demandé ce que j’avais rêvé.

– C’est une bague d’or avec une étoile faite d’une grosse émeraude, répondis-je avec l’aplomb de la certitude.

Il ne douta plus, et, détachant une tringlette des rideaux de vitrage, il la recourba en crochet et atteignit la bague, qu’il me présenta en souriant. Il pensait, sans oser le dire, que c’était un don de madame d’Ionis.

Quant à moi, je la regardai à peine, tant j’étais sûr que c’était celle dont j’avais vu l’ombre ; elle était effectivement toute semblable. Je la passai à mon petit doigt, ne doutant pas qu’elle n’eût appartenu à la défunte demoiselle d’Ionis, et que je n’eusse vu le spectre de cette merveilleuse beauté.

Baptiste mit beaucoup de discrétion dans sa conduite. Persuadé que j’avais eu une très belle aventure, car il m’avait attendu toute la nuit, il me quitta en m’engageant à me coucher.

On pense bien que je n’y songeais guère. Je m’assis devant la table, que Baptiste avait débarrassée du fameux souper aux trois pains, et, pour m’efforcer de ressaisir l’ivresse de ma vision, dont je craignais d’oublier quelque chose, je me mis à en écrire la relation fidèle, telle qu’on vient de la lire.

Je demeurai dans cette agitation mêlée d’extase jusqu’après le lever du soleil. Je m’assoupis un peu, les coudes sur ma table, et crus refaire mon rêve ; mais il m’échappa bien vite, et Baptiste vint m’arracher à la solitude où j’aurais dès lors voulu achever ma vie.

Je m’arrangeai de manière à ne descendre qu’au moment où l’on devait se mettre à table. Je ne m’étais pas encore demandé comment je rendrais compte de la vision ; j’y songeai en faisant semblant de déjeuner, car je ne mangeai pas, et, sans me sentir fatigué ni malade, j’éprouvais un invincible dégoût pour les fonctions de la vie animale.

La douairière, qui ne voyait pas très bien, ne s’aperçut pas de mon trouble. Je répondis à ses questions ordinaires avec le vague des jours précédents, mais, cette fois, sans jouer aucune comédie, et avec la préoccupation d’un poète que l’on interroge bêtement sur le sujet de son poème, et qui répond avec ironie des choses évasives pour se délivrer d’investigations abrutissantes. Je ne sais si madame d’Ionis fut inquiète ou étonnée de me voir ainsi. Je ne la regardai pas, je ne la vis pas. Je compris à peine ce qu’elle me disait, tout le temps que dura cette contrainte mortelle du déjeuner.

Enfin, je me trouvai seul dans la bibliothèque, l’attendant comme les autres jours, mais sans impatience aucune. Loin de là, j’éprouvais une vive satisfaction à me noyer dans mes rêveries. Il faisait un temps admirable ; le soleil embrasait les arbres et les terrains en fleur, au delà des grandes masses d’ombre transparente que projetait l’architecture du château sur les premiers plans du jardin. Je marchais d’un bout à l’autre de cette vaste salle, m’arrêtant chaque fois que je me trouvais devant la fontaine. Les fenêtres et les rideaux étaient fermés à cause de la chaleur. Ces rideaux étaient d’un bleu doux que je voulais voir verdâtre, et, dans ce crépuscule artificiel qui me retraçait quelque chose de ma vision, j’éprouvais un bien-être incroyable et une sorte de gaieté délirante.

Je parlais tout haut, et je riais sans savoir de quoi, lorsque je me sentis serrer le bras assez brusquement. Je me retournai et vis madame d’Ionis, qui était entrée sans que j’y fisse attention.

– Voyons ! répondez-moi, voyez-moi, au moins ! me dit-elle avec un peu d’impatience. Savez-vous que vous me faites peur, et que je ne sais plus que penser de vous ?

– Vous l’avez voulu, lui répondis-je, j’ai joué avec ma raison ; je suis fou. Mais ne vous en faites pas de reproche ; je suis bien plus heureux ainsi, et ne souhaite pas de guérir.

– Ainsi, reprit-elle en m’examinant avec inquiétude, cette apparition n’est pas un conte ridicule ? du moins, vous croyez... vous l’avez vue se produire ?

– Mieux que je ne vous vois en ce moment !

– Ne le prenez pas sur ce ton d’orgueil enivré : je ne doute pas de vos paroles. Racontez-moi tranquillement...

– Rien ! jamais ! je vous supplie de ne pas me questionner. Je ne peux pas, je ne veux pas répondre.

– En vérité, la société des spectres ne vous vaut rien, cher monsieur, et vous me feriez croire que l’on vous a dit des choses singulièrement flatteuses, car vous voilà fier et discret comme un amant heureux !

– Ah ! que dites-vous là, madame ? m’écriai-je. Il n’y a pas d’amour possible entre deux êtres que sépare l’abîme du tombeau... Mais vous ne savez pas de quoi vous parlez, vous ne croyez à rien, vous vous moquez de tout !

J’étais si rude dans mon enthousiasme, que madame d’Ionis fut piquée.

– Il y a une chose dont je ne me moque pas, dit-elle avec vivacité : c’est mon procès, et, puisque vous m’avez promis, sur l’honneur, de consulter un oracle mystérieux et de vous conformer à ses arrêts...

– Oui, répondis-je en lui prenant la main avec une familiarité très déplacée, mais très calme, dont elle ne s’offensa pas, tant elle comprit l’état de mon âme ; oui, madame, pardonnez-moi mon trouble et mon oubli. C’est par dévouement pour vous que j’ai joué un jeu bien dangereux, et je vous dois, au moins, compte du résultat. Il m’a été prescrit d’obéir aux intentions de mon père et de vous faire gagner votre procès.

Soit qu’elle s’attendît à cette réponse, soit qu’elle fût en doute de ma lucidité, madame d’Ionis ne marqua ni surprise ni contrariété. Elle se contenta de lever les épaules, et, me secouant le bras comme pour me réveiller :

– Mon pauvre enfant, dit-elle, vous avez rêvé, et rien de plus. J’ai partagé un instant votre exaltation, j’ai espéré du moins qu’elle vous ramènerait à la notion de délicatesse et d’équité qui est au fond de votre âme. Mais je ne sais quels scrupules exagérés ou quelles habitudes d’obéissance passive envers votre père, vous ont fait entendre des paroles chimériques. Sortez de ces illusions. Il n’y a pas eu de spectres, il n’y a pas eu de voix mystérieuses ; vous vous êtes monté la tête avec l’indigeste lecture du vieux manuscrit et les contes bleus de l’abbé de Lamyre. Je vais vous expliquer ce qui vous est arrivé.

Elle me parla assez longtemps ; mais je fis de vains efforts pour l’écouter et la comprendre. Il me semblait, par moments, qu’elle me parlait une langue inconnue. Quand elle vit que rien n’arrivait de mon oreille à mon esprit, elle s’inquiéta sérieusement de moi, me toucha le poignet pour voir si j’avais la fièvre, me demanda si j’avais mal à la tête, et me conjura d’aller me reposer. Je compris qu’elle me permettait d’être seul et je courus avec joie me jeter sur mon lit, non que je ressentisse la moindre fatigue, mais parce que je m’imaginais toujours revoir la céleste beauté de mon immortelle, si je parvenais à m’endormir.

Je ne sais comment se passa le reste de la journée. Je n’en eus pas conscience. Le lendemain matin, je vis Baptiste marchant par la chambre sur la pointe du pied.

– Que fais-tu là, mon ami ? lui demandai-je.

– Je vous veille, mon cher monsieur, répondit-il. Dieu merci, vous avez dormi deux bonnes heures. Vous vous sentez mieux, n’est-ce pas ?

– Je me sens très bien. J’ai donc été malade ?

– Vous avez eu un gros accès de fièvre hier au soir, et cela a duré une partie de la nuit. C’est l’effet de la grande chaleur. Vous ne pensez jamais à mettre votre chapeau quand vous allez au jardin ! Pourtant madame votre mère vous l’avait si bien recommandé !

Zéphyrine entra, s’informa de moi avec beaucoup d’intérêt, et m’engagea à prendre
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