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La marque politique, son capital-marque et l’électeur Sabine LUBRANO Doctorante au LARGEPA (Laboratoire de recherche en sciences de gestion Panthéon-Assas), Université Paris II Panthéon-Assas Centre Bosquet - 13 avenue Bosquet - 75 007 Paris Mail : sablubrano@hotmail.com Tél. : + 33 (0) 6 09 80 49 10 Pierre-Louis DUBOIS Professeur des Universités Université de Montpellier Mail : duboispierrel@wanadoo.fr Laurent FLORES Professeur INSEEC Business School Mail : lflores@crmmetrix.com La marque politique, son capital-marque et l’électeur Abstract: The main purpose of this research is to propose a conceptualization of political brand and political brand equity based on a perceptual approach (Keller, 1993). Eventually, the development of a measure method of political brand equity must allow to better understand the relationship between the political brand and the voter. Keywords: Brand, political brand, brand equity, political brand equity, congruence Résumé : L’objectif principal de cette recherche est de proposer une conceptualisation de la marque politique et du capital-marque de la marque politique basées sur une approche perceptuelle (Keller, 1993). A terme, l’élaboration d’une méthode de mesure du capital-marque de la marque politique doit permettre de mieux comprendre la relation entre la marque politique et l’électeur. Mots clés : marque, marque politique, capital-marque, capital-marque politique, congruence INTRODUCTION Depuis des décennies, de nombreux auteurs défendent l’extension du marketing des entreprises commerciales à tous types d’organisations non commerciales et l’adaptation des théories et concepts marketing notamment au domaine de la politique (e.g. Kotler et Levy, 1969 ; Kotler, 1975 ; Shama, 1975 ; Newman, 1983 ; Smith et Saunders, 1990 ; Wring, 1997 ; Reeves, de Chernatony et Carrigan, 2006). Kotler (1975, p. 761) considère ainsi que : « l’essence même des relations du candidat avec les électeurs est d’ordre marketing et l’a toujours été »1. Un argument régulièrement évoqué pour justifier cette position est que l’un des objectifs souvent cités du marketing n’est pas de vendre n’importe quoi à n’importe qui, mais au contraire de satisfaire les besoins des individus (e.g. Kotler et Levy, 1969 ; Reeves, de Chernatony et Carrigan, 2006) : « le marketing politique est généralement une force bénéfique dans la société, étant donné que le marketing politique se préoccupe de satisfaire l’électorat » 2 (Reeves, de Chernatony et Carrigan, 2006, p. 419). D’autres auteurs au contraire s’insurgent contre cette intrusion et cette vision marketing de la politique. De nombreux reproches sont formulés : une forme de propagande, voire une manipulation, le danger que les partis politiques s’attachent plus à la forme qu’au fond, qu’ils suivent l’opinion publique plus qu’ils ne la guident, l’idée que la politique n’est pas un produit, que les partis et les hommes politiques ne sauraient être assimilés à des « savons » mis en vente… Notre propos dans cette recherche n’est pas de porter un jugement sur l’utilisation du marketing dans la sphère politique. Nous avons choisi au contraire d’adopter une démarche scientifique, en transposant et adaptant plusieurs concepts – notamment les concepts de marque et de capital-marque – issus de la littérature marketing au domaine politique. L’originalité de notre recherche réside dans la perspective adoptée : nous souhaitons mieux comprendre et analyser la relation qu’entretient l’électeur avec la marque politique. L’objectif in fine de notre recherche est en effet de tester notre conceptualisation d’un modèle tridimensionnel de la relation à la marque politique fondée sur la mesure de son capital-marque. Pour tester le modèle de recherche que nous avons élaboré, une méthode de mesure du capital-marque de la marque politique sera développée afin de mieux comprendre la relation entre la marque politique et l’électeur. Mais au préalable, il est nécessaire de définir précisément ce que nous désignons sous le vocable de marque politique et de capital-marque politique. CONTEXTE ET OBJECTIFS DE LA RECHERCHE L’étude présentée ici se place sur un plan conceptuel. L’objectif principal de cette recherche est en effet de proposer une conceptualisation de la marque politique et de son capital-marque selon une approche perceptuelle (Keller, 1993). Pour ce faire, nous nous appuyons sur la littérature en marketing et en marketing politique. Les apports conceptuels et les contributions théoriques de cette recherche se situent à plusieurs niveaux :
CADRE CONCEPTUEL / REVUE DE LITTERATURE Le cadre théorique de notre recherche est structuré autour de deux concepts : la marque politique et le capital-marque de la marque politique. Appliquée au domaine politique, la littérature marketing sur les concepts de « marque » et de « capital-marque » nous aide à définir le concept de marque politique et celui de capital-marque politique. L’opérationnalisation du concept de marque politique grâce au capital-marque doit nous permettre de déterminer la valeur de la marque politique pour l’électeur. Cette étude est composée de trois parties, chacune visant à répondre à une question de recherche spécifique. Tout d’abord, pourquoi est-il pertinent d’appliquer le concept de marque au domaine politique ? Dans quelle mesure ? Pour répondre à cette question, il convient de démontrer que le concept de marque peut s’appliquer au domaine politique, l’intérêt de cette conceptualisation tout en identifiant les spécificités de la marque politique. Ensuite, que représente le concept de marque politique pour l’électeur ? Que perçoit-il comme marque(s) ? Dans quelle mesure le candidat en tant que personne se confond-il avec la marque politique ? Pour répondre à ces questions, il est nécessaire d’étudier la marque politique telle qu’elle est réellement perçue par l’électeur. Enfin, une troisième partie cherche à répondre à la question suivante : quelle est la valeur de la marque politique ?
Il convient de s’interroger sur :
Dans un premier temps, il s’agit donc de montrer que la marque politique est conceptuellement valide. La question de savoir s’il est possible ou non de considérer le candidat et/ou le parti comme une marque revient en effet régulièrement dans la littérature en marketing politique. Si certains rejettent cette idée (e.g. Luck, 1969), force est de constater que de plus en plus d’auteurs assimilent les hommes politiques et/ ou les partis à des marques. Cependant, si cette assimilation a déjà été faite par un certain nombre d’auteurs (e.g. Nakanishi, Cooper et Kassarjian, 1974 ; Shama, 1975 et 1976 ; Lock et Harris, 1996 ; Harris et Lock, 2001 ; Smith, 2001 ; Needham, 2006 ; Reeves, de Chernatony et Carrigan., 2006 ; O’Shaughnessy et Henneberg, 2007 ; Smith et French, 2009 ; Guzman et Sierra, 2009 ; Lambert-Pandraud, Laurent et Dubois, 2009 ; French et Smith, 2010 ; Phipps, Brace-Govan et Jevons, 2010), relativement peu de recherches justifient et démontrent de façon formelle le bien-fondé de cette assimilation. Une double justification permet selon nous de démontrer la pertinence de l’assimilation d’un candidat comme d’un parti à une marque :
Afin de démontrer la pertinence du concept de marque appliqué au domaine politique et ses apports, il convient donc dans un premier temps de reprendre la définition du concept de marque et d’étudier sa transposition au domaine politique. Il convient également d’étudier en quoi la marque politique joue un rôle important pour l’électeur tout comme la marque joue un rôle important pour le consommateur.
Deux définitions liées au concept de marque illustrent les deux grandes dimensions de la marque : la marque comme signifiant et la marque comme signifié (Lai, 2009). Selon la définition de l’AMA (American Marketing Association) reprise notamment par Kotler (1991), la marque se définit comme « un nom, terme, signe, symbole, dessin ou une combinaison de ces éléments qui sert à identifier les biens et services d’un vendeur ou groupe de vendeurs et à les différencier de ceux des concurrents ». Cette définition met en avant deux rôles majeurs de la marque en tant que signifiant (Lai, 2009) : les rôles d’identification et de différenciation. De nombreux auteurs (e.g. Aaker, 1991 ; Keller, 1993 ; Kapferer, 2007) ont d’ailleurs mis en avant l’importance de la marque comme élément de différenciation et son influence sur le processus décisionnel du consommateur. Si l’on transpose cette définition au domaine de la politique, on retrouve ces deux notions d’identification et de différenciation. En effet, si l’on réfléchit aux objectifs que poursuit un candidat en campagne, ceux-ci sont essentiellement de deux types :
Comme tout individu, l’homme politique possède un nom. Plus sa notoriété est forte, plus ce nom est présent et donc facilement accessible dans l’esprit des électeurs : ceci permet à l’homme politique d’être rapidement identifié par les électeurs. Ce nom lui permet également de se distinguer (se démarquer) des autres hommes politiques, qu’ils appartiennent à des partis politiques différents du sien ou qu’ils soient membres du même parti que lui. On retrouve également cette double idée d’identification et de différenciation dans le cas d’un parti. De par son nom, le choix d’un logo, parfois d’une signature, un parti politique cherche à être facilement identifié par les électeurs et à se distinguer des autres partis. La définition de l’AMA s’applique donc parfaitement aux partis politiques (Smith et French, 2009). En tant que signifiant, la marque politique permet donc de :
Cependant, la marque n’est pas qu’un simple signifiant mais également un signifié : « en plus d’être un signe permettant de distinguer les marques entre elles, la marque est associée dans l’esprit des consommateurs à un contenu, à des évocations, à un signifié » (Lai, 2009, p. 18). La dialectique marque - produit de Keller (2008) met l’accent à la fois sur les deux notions d’identification et de différenciation exposées précédemment - la marque comme signifiant -, mais également sur l’importance de la marque en tant que signifié du fait de l’existence de structures mentales associées à une marque dans l’esprit du consommateur. Elle éclaire ainsi cette double dimension de la marque. Keller (2008) considère d’ailleurs que la gestion de marque peut être appliquée à des domaines extrêmement variés : biens tangibles, services, points de vente, lieux, idées…, mais également personnes (comme les hommes politiques) ou tous types d’organisations. Si l’on s’intéresse à cette deuxième dimension de la marque - la marque comme signifié - dans le cas d’une marque politique, on peut légitimement penser que l’électeur dispose en mémoire d’un réseau d’associations lié au nom d’un candidat ayant une certaine notoriété au même titre qu’un consommateur possède en mémoire un réseau d’associations lié à telle ou telle marque commerciale. De même, un électeur possède en mémoire une connaissance des partis politiques les plus connus comme il dispose en tant que consommateur d’une connaissance des marques (Smith et French, 2009). La simple évocation du nom d’un parti (en tous cas pour les plus connus) évoque pour l’électeur un contenu spécifique. Un exemple permet d’éclairer notre propos. Lors de la campagne présidentielle de 2008 aux Etats-Unis, Barack Obama a réussi à associer à son nom une combinaison d’éléments : un logo, un code couleur, un slogan - le désormais célèbre « Yes we can » -, des supports de communication dédiés au premier rang duquel son site Internet MyBarackObama.com… Il a ainsi su construire autour de son nom une marque dans le sens de signifiant. Mais au-delà, la simple évocation de son nom suscite dans l’esprit des électeurs un contenu, un ensemble d’associations. La marque politique « Barack Obama » possède également une dimension en tant que signifié. La campagne menée par Barack Obama lui a ainsi permis de se constituer et de se présenter en tant que marque politique. D’un point de vue conceptuel, l’assimilation d’un candidat mais également d’un parti à une marque apparaît donc pertinente. Un candidat comme un parti cherchent comme n’importe quelle marque à développer sa notoriété et à créer dans l’esprit des électeurs une image de marque positive, c’est-à-dire des associations positives, fortes et uniques (Keller, 1993). Car, quelle que soit la marque considérée, l’objectif demeure le même : « créer des marques revient pour l’essentiel à créer des différences » (Keller, Fleck et Fontaine, 2009, p. 31). En d’autres termes, il s’agit de mettre en avant des avantages concurrentiels.
La marque remplit plusieurs rôles importants pour le consommateur (Keller, 2008) :
Si l’on transfère ces différents rôles à la marque politique, on retrouve ces fonctions importantes de la marque :
Parmi les chercheurs qui ont souligné la pertinence du concept de marque appliqué au domaine politique, Needham (2006) reprend un certain nombre de recherches menées sur la marque et répertorie plusieurs caractéristiques de la marque qui en font un concept utile pour expliquer le choix des électeurs. On y retrouve certaines des fonctions de la marque que nous venons d’évoquer, même s’il est important de noter que Needham établit un parallèle uniquement entre la marque et le parti politique (et non entre la marque et l’homme politique). Tout d’abord, la marque simplifie le choix du consommateur et rend moins nécessaire de devoir s’informer davantage sur le produit. De même, l’étiquette du parti évite à l’électeur de devoir connaître en détail toutes les prises de position du parti. On retrouve ici le rôle joué par la marque comme réducteur des coûts de recherche évoqué par Keller (2008), ce qui correspond à la fonction de « praticité » identifiée par Kapferer et Laurent (1983) et à la fonction de simplification de la tâche (Lai, 2009). Ensuite, la marque rassure, ce qui est source de confiance pour le consommateur. De même, l’unité et la cohérence mis en avant par le parti permettent de développer la confiance de l’électeur. Renvoyant à l’idée de contrat, de pacte entre le consommateur et la marque (Keller, 2008), cette fonction de garantie (Michel, 2004) ou de réduction du risque perçu (Lai, 2009) correspond à la fonction de « garantie » (Kapferer et Laurent, 1983). On retrouve également ici la fonction « distinctive » de la marque (Kapferer et Laurent, 1983) comme point d’ancrage permettant au consommateur de différencier les produits entre eux. Enfin, la marque tout comme le parti politique est porteuse de promesses. Cette idée renvoie – partiellement – à la dimension symbolique de la marque (Keller, 2008) et au rôle que peut jouer la marque comme symbole d’identification (Michel, 2004). Cette fonction de personnalisation de la marque (Lai, 2009) correspond à la fonction de « personnalisation » identifiée auparavant par Kapferer et Laurent (1983). Ainsi, un candidat comme un parti politique peut être considéré comme une marque dans la mesure où il est perçu comme tel par l’électeur. C’est ce que soulignent Smith et French concernant les partis politiques (2009, p. 211) : « les partis politiques sont des marques parce qu’ils agissent comme des marques pour les consommateurs »3. |
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