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Gérer l’hétérogénéité institutionnelle via la socialisation et l’identité organisationnelle, le cas des organisations hybridesEmilie Bargues ESC Clermont-Ferrand/ CRCGM/Céreq-CAR Clermont La co-habitation de logiques institutionnelles hétérogènes est un enjeu pour la théorie néo-institutionnelle des organisations et plus particulièrement pour ce que les auteurs nomment les organisations hybrides. En effet, ces organisations n’ont pas de supports stabilisés ni de guides pour construire des compromis entre des logiques d’action et de cognition contradictoires. Plusieurs auteurs ont montré que la socialisation des nouveaux entrants est une question centrale du management de l’hétérogénéité institutionnelle dans ce type d’organisation. Si nous savons l’importance de socialiser les nouvelles recrues, nous ne savons pas comment ces organisations agissent en pratique. Cette communication capitalise sur la littérature dans le domaine de la socialisation organisationnelle et formule une série de propositions sur le processus de socialisation des organisations hybrides. Nous montrons que pour survivre et gérer l’hétérogénéité institutionnelle, l’organisation hybride développe une identité organisationnelle et instille des valeurs aux nouveaux entrants via des tactiques de socialisation bien particulières. Cette recherche contribue à mieux comprendre le travail institutionnel quand les organisations font face à des environnements institutionnels hétérogènes. Mots clés Logique institutionnelle, organisation hybride, tactiques de socialisation, identité organisationnelle, institutionnalisation Gérer l’hétérogénéité institutionnelle via la socialisation et l’identité organisationnelle, le cas des organisations hybrides On recherche des moutons à cinq pattes capables de traiter simultanément des problématiques sociales et économiques très techniques pour lesquelles ils n’existent aucune formation. Cette phrase issue d’un entretien menée auprès d’un manager d’une entreprise de travail temporaire d’insertion fait directement écho à une problématique théorique au cœur des travaux sur les organisations hybrides et le management du pluralisme institutionnel. En effet, une des caractéristiques centrales des organisations hybrides1 est qu’elles font face à des logiques institutionnelles2 hétérogènes voir dans certains cas antinomiques et qu’il est particulièrement délicat de stabiliser un compromis organisationnel pour répondre simultanément à ces logiques (Glynn, 2000 ; Battilana et Dorrado, 2010 ; Pache et Santos, 2010, 2011). Cette co-habitation des logiques institutionnelles et la création d’un compromis organisationnel est d’autant plus problématique que la combinaison que proposent les organisations hybrides est par définition idiosyncrasique et qu’elles ne disposent pas de soutiens institutionnels stabilisés pour les guider dans la formation d’un équilibre. Si comme le souligne Stinchcombe, la création d’une nouvelle activité est toujours risquée (Stinchcombe, 1965), la création d’une organisation qui combinent des logiques institutionnelles contradictoires l’est encore plus (Scott et Meyer, 1991) car ces organisations ne disposent pas de modèles et de templates susceptibles de les guider dans la manière de traiter et solutionner les conflits institutionnels (Greenwood and Hinings, 1993 ; Battilana et Dorrado, 2010 ; Thornton, Ocasio et Lounsbury, 2012 ). Pache and Santos ont montré dans leur étude sur les entreprises de travail temporaire d’insertion françaises que la réponse qu’une organisation hybride apporte aux conflits de logiques institutionnelles dépend du soutien politique interne que les membres de l’organisation vont apporter à ces différentes logiques (Pache et Santos, 2010, 2011). La réponse de l’organisation est le fruit d’un compromis politique entre les différents membres de l’organisation qui soutiennent telle ou telle logique institutionnelle. Dans une perspective similaire mais plus descriptive, Battilana et Dorado montrent que la présence de logiques institutionnelles en compétition génère d’importantes tensions identitaires à l’intérieur de l’organisation entre les individus qui représentent et supportent ces logiques (Battilana and Dorado, 2010). L’intégration des logiques institutionnelles en compétition passe par des processus de recrutement et de socialisation bien spécifiques afin de coordonner les différents individus qui représentent les logiques en conflit. Elles suggèrent également dans le prolongement direct des travaux de Selznic qu’il est crucial pour ces organisations de bâtir une identité organisationnelle qui combinent les deux logiques (Battilana and Dorado, 2010). La création de cette identité organisationnelle vise non pas à supprimer les tensions entre les logiques institutionnelles mais à fournir un réceptacle commun dans lesquels les individus supportant les différentes logiques vont pouvoir pacifier leurs relations et trouver un espace cognitif et symbolique de dépassement des conflits institutionnels. Pache and Santos confirment la saillance du mécanisme cognitif et identitaire en montrant qu’à l’intérieur des organisations hybrides, les logiques en compétition sont conciliées au niveau symbolique et identitaire mais il n’en demeure pas moins que des tensions importantes au niveau pratique perdurent exposant l’organisation à des logiques d’action potentiellement contradictoires (Pache et Santos, 2011). Ces caractéristiques rendent les organisations hybrides particulièrement sensibles à l’intégration de nouvelles recrues et à la manière dont ces dernières les socialisent (Battilana et Dorado, 2010). En effet, si une nouvelle recrue ne partage pas les valeurs de l’organisation ou perturbe l’équilibre politique et symbolique interne, c’est toute l’organisation qui est mise en danger. L’on comprend alors pourquoi les processus de socialisation et de recrutement sont particulièrement importants dans ce type d’organisations car c’est à travers ces deux processus que les membres de l’organisation vont sélectionner des individus qui partagent les mêmes valeurs et agir sur leurs représentations pour qu’ils soutiennent l’activité de l’organisation et participent à son institutionnalisation. Si l’importance du recrutement et de la socialisation ont été bien identifiés d’un point de vue logique et empirique par les auteurs qui travaillent sur les organisations hybrides, on sait en revanche peu de choses sur la manière dont ces organisations gèrent la socialisation de leurs nouvelles recrues. Comment agissent-elles sur les représentations des nouvelles recrues ? Existent-ils des processus de socialisation formels ou plutôt informels ? Les individus recrutés sont-ils accompagnés et formés durant la phase de socialisation ? Est-ce que l’organisation hybride agit directement sur l’identité des nouvelles recrues ou bien respecte-t-elle les valeurs et croyances des nouveaux entrants ? Face à l’enjeu de la socialisation dans les organisations hybrides et à l’absence de réponses systématiques sur les tactiques de socialisation que ces organisations sont susceptibles de mettre en œuvre, nous proposons dans cet article de capitaliser sur la littérature en matière de socialisation organisationnelle afin d’une part, de caractériser les tactiques identifiées par les travaux les plus récents sur la socialisation dans les organisations hybrides mais également de formuler des propositions théoriques sur les spécificités de ces organisations en matière de socialisation. Notre travail vise ainsi à mieux comprendre les tactiques de socialisation mises en œuvre dans les organisations hybrides afin de ne pas perturber mais au contraire renforcer l’équilibre cognitif et politique entre les logiques institutionnelles en compétition. Dans la première partie de l’article, nous présentons les enjeux liés à la socialisation dans les organisations hybrides. Nous revenons dans un premier temps sur les acquis des recherches en matière de socialisation organisationnelle et présentons les effets de la socialisation sur l’identité organisationnelle et l’internalisation des valeurs. Nous abordons ensuite le cas spécifique des organisations hybrides et montrons qu’elles ne peuvent se passer d’un management symbolique qui débute avec la socialisation des nouvelles recrues. Dans la deuxième partie de l’article, nous traitons spécifiquement des tactiques de socialisation qu’une organisation hybride peut mettre en œuvre en déroulant un jeu de propositions. Nous présentons enfin les perspectives de recherche que ce travail de repérage théorique peut susciter. Cette recherche vise à préciser les tactiques de socialisation dans les organisations hybrides et contribue à enrichir en ce sens la compréhension du fonctionnement de ce type bien particulier d’organisations qui face à une économie marchande généralisée fortement tournée vers la logique de profits innovent et proposent des alternatives pour pallier et traiter les défaillances des marchés et des Etats. Cette recherche a également un intérêt pour la littérature sur la socialisation organisationnelle car les spécificités des organisations hybrides peuvent potentiellement éclairer sous un nouveau jour la socialisation dans les organisations plus conventionnelles c'est-à-dire qui disposent de structures de médiation dans leurs champs organisationnels pour traiter l’hétérogénéité institutionnelle. Elle offre ainsi des pistes concrètes pour penser le changement institutionnel lorsqu’une logique dominante est contestée et remplacée par une autre logique. Une compréhension plus fine des tactiques de socialisation éclaire donc la dynamique de changement institutionnel ainsi que le travail institutionnel. Ce travail a également pour mérite de mettre en évidence l’importance du management symbolique dans les organisations hybrides, dont la survie repose sur une croyance quasi-mystique sur l’importance de la mission de l’organisation, croyance qui relie entre eux les membres de l’organisation et leur permet de se maintenir dans un environnement institutionnel fortement hétérogène. |
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